Est-ce une question de chance ou au contraire, de talent ? Parce qu'elle est exemplaire, Tempête aujourd'hui ; et le mot est faible. Malgré un petit temps durant lequel elle s'emploie à vérifier ses appuis et à prendre son élan, elle s'élance, tangue un peu dans les airs, mais son attaque Picpic touche le pauvre Bulbizarre de plein fouet. Il tombe sur le côté dans un cri étonné, durant lequel Oliver s'emploie à reculer pour avoir suffisamment d'espace ; puis il tire de sa poche une Pokéball vide. Décidément, en plus de l'entraînement de sa petite Nirondelle, la chasse est sacrément bonne aujourd'hui, songe-t-il avec un sourire très satisfait avant de féliciter chaleureusement son Pokémon qui piaille de fierté. « Tu sais quoi ? Pour l'arène, je te garde, dit-il avec un large sourire. » Au moins pour la prochaine, ensuite il avisera ; son but est d'en entraîner bien plus de six, après tout.

Sauf que ce n'est pas aussi simple. D'abord, parce que le lancer de la Pokéball était objectivement très mauvais, mou ; ensuite, parce que le Bulbizarre n'a pas du tout l'intention de se laisser capturer par un connard qui lui a marché dessus, en fait. La sphère tourne furieusement dans tous les sens, puis s'ouvre et se brise devant le Bulbizarre qui, en dépit de l'affaiblissement, pousse un cri très énervé et laisse ses lianes se tendre en direction de Tempête qui recule en quelques petits bonds énergiques. En tout cas, et même si son aile l'handicapera à vie, elle ne manque clairement ni d'énergie ni de courage. Et lui, il ne va absolument pas laisser filer un Pokémon qui certes, a l'air d'avoir du caractère, mais qui semble aussi suffisamment costaud pour endurer une attaque Vol. Alors il inspire, saisit une nouvelle Pokéball à sa ceinture et la lance de nouveau.

« T'as décidé de faire chier toi, hein ? » Marmonne un Oliver aux sourcils froncés, qui lève les yeux au ciel quand il voit le Bulbizarre sortir une deuxième fois de la ball toute neuve et désormais parfaitement inutilisable. Bien sûr que ça l'agace, parce qu'il aimerait bien repartir avec ce foutu Pokémon et ne pas avoir à repasser à la boutique de Castlerain tous les jours parce que ces fichues bêtes refusent obstinément la domestication. Maintenant qu'il y pense, heureusement qu'aucun Pokélover ne peut entendre ses pensées, tiens. Avec un soupir, le batteur finit par abdiquer, saisir une troisième ball et se pencher vers le Bulbizarre. « Allez. J'te jure que t'as rien à perdre à venir avec moi en plus. Je suis désolé, j'ai pas fait exprès de te marcher dessus. » Il regardait juste ailleurs, c'est pas un crime quand même non ? Et puis il se plairait avec les autres ce Pokémon, il en est sûr.

Bon, par contre au bout de trois fois ça commence à l'emmerder là, et sérieusement. Oliver soupire quand la Pokéball explose encore une fois, et que le Bulbizarre lui adresse un regard clairement provocateur. Il n'a pas envie de venir, c'est bon, message reçu, de toute façon il lui casse les pieds, c'est bien simple. Les sourcils froncés, il choisit le ragequit Oliver, préférant reculer et ramasser son sac, définitivement agacé par le comportement du Pokémon. Il veut pas venir ? Bah soit, qu'il aille se faire foutre alors, s'il veut rester toute sa vie dans cette forêt à la con sans jamais grandir, apprendre ni évoluer, bah soit. Sauf que Tempête n'a pas du tout l'air de cet avis ; quand il l'appelle, elle ne le suit pas, et s'approche du Pokémon devant lequel elle se met à piailler d'encouragement. Comme si ça allait changer quelque chose, on dirait même que le Bulbizarre ne l'écoute même pas.

Sauf que cette fois, ça a l'air de marcher, et s'il ne fait pas attention au départ, c'est seulement parce qu'il est trop occupé à faire la gueule. « Bon allez Tempête, laisse tomber on y va, là. » C'est bon, il va pas s'empoisonner la vie avec un Bulbizarre qui refuse de venir avec lui en dépit de ses excuses, ça va bien, il n'est pas obstiné à ce point. Il avance, tourne le dos aux deux Pokémon jusqu'à ce qu'un battement d'ailes à sa droite attire son attention ; surpris par le poids soudain sur son épaule, il voit sa Nirondelle s'y poser maladroitement, mais elle y est arrivée. Et ça, depuis le sol. Il en écarquille les yeux Oliver, aussi surpris que ravi. « Ben... oh, c'est super ! » s'exclame-t-il, un peu comme un con, avant de fouiller dans une poche de sa petite sacoche pour lui tendre une friandise.

Et le mot est faible, clairement. Parce qu'il est affreusement fier Oliver, quand il sourit de toutes ses dents à sa Nirondelle, toute mauvaise humeur envolée. Parce qu'elle va devenir une championne elle aussi, parce qu'il se voit déjà affronter la Ligue avec un Hélédelle ramassé tant bien que mal, soigné et rééduqué, un peu comme lui. C'est important, et quand il en prend conscience, c'est pour mieux lui adresser la plus affectueuse des caresses sur la tête. Ce n'est que lorsqu'une petite pression contre sa jambe se fait sentir qu'il se détourne ; très surpris, il baisse la tête. Le Bulbizarre est là, et il a l'air beaucoup plus aimable, d'un seul coup. Qu'est-ce qu'elle lui a dit, Tempête ? « Ah, tiens. Tu veux venir avec moi finalement ?
– Bulbi ! » Ça doit vouloir dire oui ça, non ? Il se penche, attrape une autre ball, mais non. Le Pokémon secoue la tête, avant d'entreprendre de lui emboîter le pas. Soit, message reçu.

C'est le premier Pokémon qu'il attrape qui ne supporte pas la ball, tiens, songe-t-il distraitement en progressant dans la forêt, en laissant à Tempête le loisir de décoller de nouveau sur une branche un peu plus haute pour chasser un second Chenipan à qui elle ne laisse pas la moindre chance. On lui avait dit que certains n'aimaient pas du tout être enfermés ; ce doit être le cas de ce Bulbizarre qui marche avec lui, et il ne l'avait tout simplement pas compris. Comme quoi, tout comme ses Pokémon, Oliver a encore un certain nombre de choses à apprendre, hein ? Heureusement que sa Nirondelle est passée par là pour régler la mésentente, sinon il aurait sûrement dû s'en trouver un autre. Au lieu de cela, le Bulbizarre suit tranquillement la marche. Comment va-t-il l'appeler, celui-là ? Kasbonbek, ça sonne plutôt bien. Quelque chose lui dit que Gaspar va désapprouver, mais tant pis, hein ?

Non, Kasbonbek c'est une idée à la con. Il va avoir l'air de quoi Oliver, quand il va se présenter à la Ligue ? Entre Choupette et ça, non merci, songe-t-il en adressant tout de même un sourire très encourageant à son nouveau compagnon de route, qui n'a plus du tout l'air fâché contre lui, maintenant. « Vraiment désolé pour tout à l'heure, dit-il finalement au Pokémon qui lève la tête pour l'écouter. J'avais pas compris que tu voulais pas rentrer dans une pokéball, et j'avais pas franchement prévu de te trébucher dessus, je regardais ailleurs. Bon alors, ça résoud pas le problème ; comment on va t'appeler ? » Un truc majestueux, classe. Le truc, c'est que même dans les films, il ne sait pas trop quel genre de lézard vert peut porter un nom sympa. Il y a bien Godzilla, mais tous les gamins appellent leur Florizarre comme ça non ?

Au pire il ira regarder sur internet, il est presque persuadé qu'il y a des générateurs de noms même si ça l'emmerde un peu de choisir par défaut comme ça. Ou alors il va attendre de connaître son caractère, c'est possible aussi ; il va aussi falloir qu'il réfléchisse pour le petit Ouisticram, quoi qu'il a déjà une assez bonne idée en tête. Eowyn, ça a l'air de plutôt bien lui aller si d'aventure elle avait un caractère comme il se le figure. Pourquoi ne pas prendre un nom inspiré de la même Saga pour le Bulbizarre, tiens ? Ça ressemble à une excellente idée, non ? Il réfléchit un moment. Sauron, non. Gandalf, ouais, mais non. Aragorn irait bien à un Guériaigle mais pas à... Balrog. C'est pas mal ça non ? « Balrog, ça t'irait comme surnom ? » demande-t-il au Bulbizarre qui semble réfléchir un moment... puis donne son assentiment. Bulbi !

Bien, ça c'est fait ; le nom est choisi, ils vont pouvoir passer à la suite, songe-t-il en reportant son attention sur Tempête, toujours perchée sur les branches. Elle a l'air de faire une petite pause ; elle saute de l'une à l'autre en étendant à peine les ailes. « Allez, on reprend ma grande ! » lance-t-il à son attention, et sa Nirondelle tourne sa petite tête pour l'observer, pencher doucement la tête. « On essaie de faire un peu plus difficile, qu'est-ce que t'en dis ? On va essayer de trouver une clairière. » Elle a fait de sacrés progrès, depuis ses multiples défaites au lac. Maintenant, elle a l'air un peu plus vaillante et déterminée, et il n'y a pas besoin de Silver pour la sortir d'une éventuelle étendue d'eau. De toute manière, maintenant qu'il a Balrog, il commence à avoir une petite idée d'une nouvelle façon de l'entraîner.

Le seul problème, c'est qu'Oliver ne connait pas très bien cette forêt. Il n'y a pas été souvent, tout au plus quelques ballades avec ses parents quand il était gosse ; il aime bien cet endroit, c'est calme, tout vert et il fait frais. Mais de là à retrouver son chemin, à distinguer un buisson d'un autre, il y a quand même un univers, songe-t-il avec une petite grimace. Au pire, il aura bien un GPS de randonnée sur son Motismart, il trouvera un moyen sûr de sortir, et en attendant, il a une clairière à trouver. Décidant de suivre le cours d'un petit chemin qui s'avance entre les troncs épais des arbres, le batteur se surprend à rêvasser, reprenant Tempête qui se pose sur son épaule en attendant de mettre en application sa petite idée. C'est pas plus mal, parce qu'au final, ça lui permettra aussi de faire connaissance avec son tout nouveau compagnon.

D'ailleurs on lui avait dit qu'il y avaient des Ouistempo ici, et c'est un peu plus pour ce petit Pokémon là qu'il a fait cette promenade ; pour le moment, il n'en a pas vu un seul. D'après ce qu'il a lu sur le net et les petits conseils qu'il a demandé aux dresseurs de passage, il est possible de trouver le Pokémon grâce au bruit qu'il fait ; le souci, c'est que le bruit ne manque absolument pas dans cet endroit, bien au contraire. Les Pokémon volants se sont tous retrouvés ici, et leurs cris résonnent sous le couvert des arbres ; difficile, alors, de guetter le bruit caractéristique des petits Ouistempo, finalement. Ceux-ci tapotent régulièrement les branches sur lesquelles ils sont, parce que cela leur permet de se retrouver ; sauf qu'il est souvent bien impossible, même pour une oreille aiguisée, de distinguer le fracas d'un morceau de bois sur un tronc ou une branche quand les piafabecs hurlent à la mort, non ?