Le soleil est à son zénith lorsque j'arrive finalement en approche du fameux lac que les locaux surnomme l'Oeil de Lathea. Je viens de passer la matinée au Laboratoire scientifique de Castlerain et j'en ai par dessus la tête. Des fois j'ai l'impression que nous ne faisons pas tous le même métier. Je peste intérieurement. On fait le même métier mais j'ai rien d'un rat de laboratoire ! Je passe ma vie sur le terrain, proche de mes sujets d'observation ! Je me cantonne pas à l'étude de pokémon en cage ou hors de leur milieu naturel. Je ne comprends tout simplement pas.

Et puis je dois avouer que la grande ville c'est carrément pas pour moi. Si j'y vais parfois c'est à reculons et j'essaye d'y passer le moins de temps possible. Tous ce béton et ces gratte-ciels. Brrr... Ca me file la chair de poule. Heureusement la région semble convenir à tout le monde et une large partie de cette dernière est constituée d'arrière-pays plutôt sauvage et propice à de belles aventures. Etrangement toutes les régions que j'ai déjà visité connaissent plus ou moins toutes cette pluralité de reliefs ahurissante, allant du désert aux montagnes enneigées. Comme si une entité supérieure avait décidé de créer toutes ces régions selon un plan bien précis. Mais je digresse.

Bibi, ma petite Bombydou est de sortie comme d'habitude. Je partage certaines idées des Pokélovers, notamment lorsqu'il s'agit de laisser mes pokémon libres de leur mouvement. Je me refuse à les enfermer dans une prison sauf en cas de danger extrême. Elle bourdonne autour de moi, visiblement contente de se retrouver dans ce lieu. Je dois avouer que je partage son avis. Après la grisaille de Castlerain, rien de mieux que de se poser et apprécier la beauté de la nature. Une belle après-midi en perspective.

"Tu peux t'amuser mais ne pars pas trop loin."

Je conseille à ma Bombydou comme à mon habitude. Je la sais très prudente et timide de nature alors je n'ai réellement aucune crainte. C'est plus par réflexe. Une sorte d'instinct paternel dirons nous. Je m’assois au bord du lac sur l'herbe fraîche et sort mon fidèle carnet de notes, impatient d'observer l'écosystème local. Je commence déjà à prendre les paris dans ma petite tête. Après réflexion, je devrais miser sur des pokémons de type Eau mais j’aimerais quand même bien pouvoir dénicher quelques insectes.

On ne se refait pas.

Aujourd'hui, c'est avec Nox qu'Oliver a décidé de sortir. Dresseur et Pokémon ont besoin, tous les deux, d'aller prendre un peu l'air ; sa hanche va bien, la journée est belle, Mallory n'est pas disponible pour répéter et il n'a absolument rien à faire. Si en temps normal, cette belle journée n'aurait eu d'écho pour le batteur que les lueurs du soleil à la fenêtre dont il aurait été obligé de tirer les rideaux pour que ce dernier ne se reflète pas sur l'écran de la télévision, force est pourtant de constater qu'un certain nombre de choses ont changé, ces derniers temps. En premier lieu, ses rythmes de sortie par exemple. Aujourd'hui, pas de weed, pas de jeux vidéo, pas de films débiles ni de bière, avachi sur son canapé en se demandant pour quelle raison sa vie est aussi merdique - bien que sa hanche blessée lui donne une réponse assez claire sur le sujet - mais bel et bien une balade de quelques heures près du lac. En faire le tour prendrait trop de temps, mais une petite marche dans la forêt bordant l'Oeil de Lathéa ne pourra lui faire que du bien, et à Nox également.

L'Evoli gambade, tout heureux d'être seul à seul avec son dresseur. Maintenant qu'ils s'apprivoisent, Oliver lui découvre un caractère au moins aussi joueur que tendre, et c'est une bonne chose. Nox est heureux aujourd'hui, il court dans tous les sens, renifle une touffe d'herbe ou un buisson de passage, court après un Pokémon ou un autre quand il en débusque un près de la rive, ou dissimulé par la végétation. L'eau est d'un bleu limpide, presque flamboyant à la lueur du soleil qui grimpe dans les hauteurs du ciel et Oliver sourit, heureux de voir son petit Evoli jouer en pensant à la soirée à venir, quand il rentrera de sa balade heureux d'avoir bien rempli sa journée, et soulagé de profiter du confort de son appartement, avec son équipe autour de lui pour se reposer. Il apparaît très clairement que rien, absolument rien ne pourrait perturber une journée aussi paisible que celle-ci.

C'est sans doute pour cette raison qu'il ne se méfie pas, le batteur, quand après une heure de marche tranquille, il décide de faire une pause à l'ombre d'un immense chêne. La végétation lui cache l'éventuelle présence de Pokémon à l'intérieur, et c'est plutôt une bonne chose ; il n'a jamais vraiment été fan des insectes, quand bien même s'est-il toujours appliqué à écouter les conseils de ses parents. A savoir qu'en dépit du dégoût que certaines espèces de Pokémon pourraient lui inspirer, chaque vie a son importance et il appartient de respecter les émotions de chacun. Quand il était jeune, il a fait beaucoup de peine à un Statitik en bondissant d'horreur quand celui-ci s'est approché, et il n'a pas l'intention de recommencer. Alors qu'il s'installe contre le tronc, il soupire de soulagement en tirant une bouteille d'eau de son sac, ainsi qu'une boite pleine de friandises ; attiré par l'odeur, Nox se précipite pour s'en emparer, accompagné d'un Aspicot un peu téméraire, sorti de nulle part.

Le Pokémon sauvage approche doucement, et Oliver est bien obligé de ne rien dire ; en fait, c'est son Evoli qui prend le relai, un peu chatouilleux avec la nourriture. « Tu pourrais partager, quand même, note le batteur avec un sourire, sans être écouté bien entendu. » Bien au contraire, Nox montre les dents, et chasse l'importun d'un coup de tête bien senti, qui fait aussitôt pleurer le pauvre Pokémon évincé, dans un grand concert de sanglots et de couinement. Jusqu'à ce qu'un terrible vrombissement retentisse au-dessus de lui.

Et voilà comment une journée parfaite peut tourner au pire des cauchemars, songe brièvement un Oliver paniqué qui, cinq minutes plus tard, clopine aussi vite qu'il le peut sur le chemin pour échapper à une horde de Dardargnan furieux. Il court sur la route, rejoint la berge, croise le regard surpris d'un homme assis au bord de l'eau, carnet à la main et qui sursaute ; à vrai dire il n'a pas vraiment besoin de lui expliquer Oliver, quand il passe devant lui poursuivi de très près par les insectes en furie, Nox courant devant lui comme si tous les enfers étaient à leurs trousses. « BARREZ VOUS ! » s'écrie-t-il, dans la ferme intention de trouver un abri ; c'était bien entendu sans compter cette racine à la con, qui vient justement trouver son pied pour lui faire perdre l'équilibre, tomber en avant quelques mètres plus loin. Génial, songe-t-il en grognant de douleur, prenant déjà appui sur ses mains pour tenter de se remettre debout. D'abord les Piafabec au bois, maintenant ça. Quelque chose lui dit vaguement qu'il devrait arrêter d'être optimiste quant à ses sorties dominicales, sérieux.

Je soupire de contentement en me repaissant des rayons chaleureux d'un soleil qui d'habitude ne me pardonne pas. Quand t'es roux avec des tâches de rousseur, généralement t'évite ! Mais je suis un baroudeur et j'ai traversé des endroits autrement plus difficiles ! J'ai d’ailleurs un assez mauvais souvenir du Désert délassant d'Unys pour m'y être perdu et avoir manqué de mourir de soif... Ca c'était chaud niveau UV ! Remarque les Torub'Iles de Johto dans le genre c'était pas mal aussi. En plein été sur un bras de mer sans possibilité de s'abriter. J'avais pas mal dégusté...

Dans tous les cas, je profite de ce cadre idyllique et rafraîchissant. Ce lac est bien plus grand que je ne l'aurais crû en regardant la carte. Je sais que ma ville d'adoption Halosis se trouve au bord de ce dernier mais je suis tout bonnement incapable de la voir depuis ma position à l'extrême sud du lac. Il doit faire plusieurs kilomètres de diamètre. Et accessoirement abriter tout un tas de pokémon de type Eau. Des pokémons que je compte bien étudier toute l'après-midi. Le tout entrecoupé de jeux en compagnie de ma petite Bombydou.

Quelle belle journée.

C'est alors que le silence des environs est brisé par les cris affreux d'un homme. Je tourne la tête et je vois un type courir comme un dératé dans ma direction. Circonspect et loin de m'en émouvoir, je me fige et là j'entends un bourdonnement très puissant suivi d'une vision... Hallucinante !

"Des Dardagnans !"

Je m'exclame de joie ! Ces derniers font partie de mes pokémon préférés ! Si en voir autant d'un coup n'est pas anodin, les voir se mouvoir en formation d'attaque c'est beaucoup plus rare ! Je commence immédiatement à gribouiller sur mon carnet de notes et à faire un croquis grossier de la scène. Je m'attarde sur leurs immenses yeux cramoisies exprimant si joliment leurs émotions. En l’occurrence la colère... C'est alors que je vois l'homme en question trébucher juste à côté de moi et s'étaler de tout son long sur le sol comme une crêpe. Je tique et me met directement à plat ventre, imitant l'homme en panique.

"Superbe réaction, Monsieur ! C'est rare de voir ça. Surtout chez un gars de la ville."

Se mettre à plat ventre et ne plus bouger est en effet une technique réputée efficace contre les nuées de pokémon insectes ! Ces derniers mus par l'instinct ne pensent fondamentalement qu'à piquer tout ce qui bouge. En se faisant tout petit et plat, leurs yeux sont beaucoup moins capables de nous repérer et de voir en nous une quelconque menace. J'invite même Bibi à me rejoindre au sol, de peur qu'elle soit prise pour cible. Ceci fait, je jette un coup d’œil à la nuée de Dardagnans qui nous tourne toujours autour dans un brouhaha indescriptible. Je reporte mon attention sur mon partenaire d'infortune et je laisse échapper un rire franc, trahissant mon expérience dans ce genre de mésaventure.

"Vous êtes un confrère scientifique ?"

Le bourdonnement qui résonne près de lui fait battre son coeur beaucoup trop vite ; étalé sur le sol comme une crêpe, son Evoli avec lui qui s'est mis à plat ventre pour imiter son dresseur, Oliver attend la sentence avec beaucoup trop d'appréhension. Il imagine déjà les dards acérés des Pokémon se précipiter vers lui et le trouer de mille blessures, c'est aujourd'hui qu'il meurt alors ? D'accord. Il aurait beaucoup aimé dire à Gaspar qu'il l'aimait une dernière fois et aux autres que le groupe c'était vraiment génial, mais son Motismart est dans la poche de son jean, et se contorsionner pour s'en servir serait purement suicidaire. Allez, en espérant que ça se passe vite, hein ?

Et tout à coup, un bruit mat retentit à côté de lui ; surpris, Oliver écarquille les yeux quand il reconnait le visage taché de son de l'homme qui était tranquillement assis dans l'herbe au bord du lac. Qu'est-ce qu'il fout là, pourquoi n'est-il pas parti de l'autre côté pour échapper à l'essaim ? Et c'est quoi cette tête d'imbécile heureux, là ? Il a l'air parfaitement ravi d'être ainsi mis en danger, et s'il le reconnait Oliver, il est bien incapable de savoir d'où pour le moment, un peu trop gagné par la panique pour réfléchir. C'est pas comme s'il y avait une vingtaine de Dardargnans en furie au-dessus d'eux, mais presque.

« Superbe réaction, Monsieur ! C'est rare de voir ça. Surtout chez un gars de la ville. » De quelle réaction il parle, exactement ? Il est presque horrifié maintenant Oliver, parce que là vraiment il ne sait pas du tout de quoi cet homme parle ; et quand un Bombydou finit par les rejoindre au bout de quelques secondes, le batteur finit par comprendre. A tous les coups, ce type est un mordu des insectes, et il est ravi de se frotter à une bande de Pokémon furieux qui vont les tuer mais c'est pas grave si c'est pour la science, hein ? Au-dessus d'eux, les Dardargnans volent toujours, tournent autour de leurs silhouettes allongés ; sa hanche n'a pas été touchée, mais il a quand même sacrément mal, et il sait que lorsqu'il va falloir se redresser, il va clairement en chier, le musicien. C'est formidable, il se remettait tout juste de l'accident avec les Piafabec, maintenant il va falloir soigner les piqures. Il ne sortira plus après ça. Ou alors c'est Nox qui leur porte la poisse ?

« Vous êtes un confrère scientifique ?
– A... absolument pas, répond le jeune homme en écarquillant les yeux devant l'air enjoué de l'homme étalé à plat ventre devant lui. J'suis, j'suis musicien, mais... vous avez pas peur, là ? » Non parce que, ils vont les manger, on est bien d'accord ? Il ne bouge plus, raide et immobile, pose ses mains sur sa tête ; quelques secondes passent, avant que le vrombissement s'éloigne. Ne pas bouger, alors ? Rester à plat ventre ? « Merde, ça a marché, j'y crois pas, souffle le musicien, les yeux écarquillés. » Puis, se tournant vers l'inconnu qui ne l'est pas tant que ça, il fronce les sourcils. « Sans déconner, vous êtes un passionné des insectes ? J'ai déjà rencontré un mec comme ça à Kanto, il vous ressemblait un peu d'ailleurs. » Un fêlé qui voulait absolument étudier les Munja, et qui avait eu recours aux talents de Mallory pour ça.

"Peur de quoi ? Des Dardagnans ?"

J'écarquille les yeux comme si j'entendais le truc le plus bizarre de ma vie. En vrai j'arrive pas à assimiler que les gens normaux ne connaissent rien des pokémon de type Insecte. Ces derniers sont largement sous-estimés et génèrent généralement des opinions plutôt négatives. Qui n'a jamais vu une ménagère hurler devant un Chenipan trop aventureux ? A vrai dire les gens de la ville n'ont probablement jamais vu de Chenipan ou d'Aspicot alors bon... Mais bon l'empathie c'est pas mon truc.

"Non ils ne vont pas nous manger, rassurez-vous. Du moins si on reste bien plaqués au sol."

Le simple fait que j'ai à prononcer ces paroles m'indique que l'intrus n'est pas un scientifique. Même s'il me le confirme dans la foulée. Il s'est juste mangé une racine et s'est aplati comme une crêpe. Comme quoi certains naissent avec une chance de cocu. Je me retiens de lui demander comment va sa copine ou sa femme. Je glousse intérieurement. En vrai, j'ai pas assez de couilles pour ce genre de trait d'esprit. Et puis les gens ne méritent pas que je leur porte ce genre d'attention en règle générale.

"Effectivement les Insectes sont ma passion. Kanto vous avez dit ?"

Si je n'ai pas la mémoire du siècle mes longues études et mon métier m'ont formé à ce genre d'exercice. Le temps que la nuée de Dardagnans s'éloigne, je retrace cet épisode de ma vie. Je reviens ainsi à mes débuts et à mes premiers amours ; Ningale, un pokémon Insecte très étrange dont l'évolution est soumise à une particularité qui a de tout temps engendré de folles rumeurs. En effet, dans de rares cas ce pokémon évolue non seulement en Ninjask mais aussi en Munja, un pokémon de type Spectre et Insecte. Un sujet d'étude super intéressant qui a propulsé ma carrière de scientifique.

D'ailleurs, je me souviens avoir rencontré un dresseur au moins aussi intéressé que moi. Un type aussi étrange que Munja et qui était un fan absolu des pokémon Spectre. Maurice ? Martin ? Marie ? Mallory ? Ouais c'était Mallory ! Un type réglo. Ce n'est clairement pas le gars que j'ai en face de moi. Je me souviens pas d'avoir croiser d'autres personnes ce jour là ? Peut être que Mallory avait des amis ? Meh, je n'avais d'yeux que pour Munja. Je reviens au présent et constate que les Dardagnans sont repartis dans la forêt. Du moins pour le moment.

"C'est bon le pire est passé. Restez sur vos gardes, les Dardagnans sont très territoriaux. Vous les avez déranger et ils lâcheront pas l'affaire de si tôt."

Je m’assois et reporte mon attention sur mon camarade de fortune tout en gribouillant quelques croquis sur mon carnet. Je suis curieux de savoir pourquoi les Dardagnans ont pourchassé ce type mais je préfère lui parler du bon vieux temps.

"Mallory ça vous parle ? Désolé ça remonte à tellement longtemps. Mais j'ai l'impression que ce type bizarre aux Munja, c'était moi. Ca nous rajeunis pas tout ça..."

« Peur de quoi ? Des Dardagnans ? » Alors, oui ? Pourquoi cela parait-il aussi surprenant, en fait ? Les Dardargnans sont énormes, méchants, agressifs, et les accidents en forêt ne sont pas si rares quand il s'agit de ces créatures, donc oui, Oliver part du principe qu'il a absolument toutes les raisons d'avoir peur ; pourtant, l'homme le regarde comme s'il venait d'avaler une poignée de boue juste sous sa figure. Est-ce qu'il peut oser considérer ces bêtes-là comme au moins aussi affectueuses qu'un Evoli ou un Chinchidou ? Il est bien incapable de les comprendre, ces gens-là, ces passionnés d'un type dont l'amour pour la vulgarisation et la volonté de les faire connaître leur fait oublier le danger. Parce que là, et quand bien même ne bougerait-il pas, Oliver est terrifié, concrètement. « Non ils ne vont pas nous manger, rassurez-vous. Du moins si on reste bien plaqués au sol. » Oh, il n'a pas du tout l'intention de bouger tout de suite ; au moins le temps que le bourdonnement furieux s'éloigne, il va rester bien sagement allongé sur le ventre. S'il a mal à la hanche, c'est cette fois sa cheville qui a pris le plus cher ; cette garce de racine l'a fait tomber à plat-ventre et tout a été beaucoup trop vite pour qu'il pense à se protéger autrement qu'en plaquant ses coudes au sol. La casse est limitée mais bordel, est-ce qu'il va vraiment rentrer de toutes ses balades couvert de contusions et de coupures ou ça va s'arrêter à un moment ?

Bon, et cette olibrius, il sort d'où exactement ? « Effectivement les Insectes sont ma passion. Kanto vous avez dit ?
– Ouais, Kanto. J'me rappelle vaguement de ça, quand on s'est approchés de Jadielle. » Ou alors y avait-il un autre frappé de la tête mordu des insectes, mais ça doit quand même pas courir les ruelles, si ? Il espère que non en tout cas ; encore un peu et il aurait vu ce mec chanter une véritable chanson d'amour en l'honneur des horribles Pokémon dont l'essaim finit par s'éloigner, tandis que l'inconnu pas si inconnu réfléchit. Celui-là, il a l'air de cotoyer l'être humain une fois tous les deux siècles ; il n'y a qu'à voir à quel point il est dans sa bulle tout de suite, Oliver se relèverait pour danser une gigue qu'il ne bougerait pas, il en est certain. Quelque part, il trouve ça un peu rigolo, quand même.


D'ailleurs, je me souviens avoir rencontré un dresseur au moins aussi intéressé que moi. Un type aussi étrange que Munja et qui était un fan absolu des pokémon Spectre. Maurice ? Martin ? Marie ? Mallory ? Ouais c'était Mallory ! Un type réglo. Ce n'est clairement pas le gars que j'ai en face de moi. Je me souviens pas d'avoir croiser d'autres personnes ce jour là ? Peut être que Mallory avait des amis ? Meh, je n'avais d'yeux que pour Munja. Je reviens au présent et constate que les Dardagnans sont repartis dans la forêt. Du moins pour le moment. « C'est bon le pire est passé. Restez sur vos gardes, les Dardagnans sont très territoriaux. Vous les avez déranger et ils lâcheront pas l'affaire de si tôt.
– J'me suis assis contre un arbre, si c'est pas malheureux de pas pouvoir se poser sans indisposer une bande d'insectes susceptibles... » C'est quand même dingue ça, songe un Oliver presque outré en se redressant péniblement, grimaçant sous la douleur qui lui scinde les reins en deux. Sans parler de sa cheville tordue et de sa dignité encore au sol mais ça, c'est une autre histoire. Il a presque l'habitude, finalement. Entre ça et les piafabecs qui lui ont démoli le dos, il va finir par prendre un abonnement en bullying Pokémon, le dixième sera sûrement gratuit ?

« Mallory ça vous parle ? Désolé ça remonte à tellement longtemps. Mais j'ai l'impression que ce type bizarre aux Munja, c'était moi. Ca nous rajeunis pas tout ça... » Ah, donc c'est bien lui ; Mallory avait été absolument fasciné par le discours de l'homme au sujet des Munja à l'époque et de ce que contenait la coque vide de ce Pokémon. Pour sa part, ça lui avait toujours glacé le sang ; il se souvient d'avoir passé une après midi avec eux sans bien avoir suivi ce qu'il s'était passé. Les deux hommes penchés sur un genre de cadavre d'insecte, c'était pas vraiment sa came à Oliver, et ça ne l'est toujours pas. D'ailleurs, le constat lui fait hausser un sourcil curieux. « Ouais, c'était Mallory. Il est champion d'une équipe de Spectres maintenant mais bon, il a pas de Munja, j'suis désolé. » Donc ça ne doit pas beaucoup l'intéresser, non ? Comment il s'appelle, ce type ? « Ça vous est venu comment, exactement, d'ailleurs ? » Poursuit-il en regardant l'entomologiste tracer des gribouillis sur un carnet. « J'veux dire, les machins qui piquent, qui empoisonnent, qui agressent et qui au demeurant ont une esthétique bien à eux, hein. C'est quand même pas très commun, les gens qui adorent les insectes passé les dix ans. » Bon, peut-être qu'il est un peu secoué ; dans le cas contraire, il se serait sans doute rendu compte qu'il est odieux, là.

La forêt pour les pokémon c'est comme la ville. Elle répond à des codes précis et est régit par des règles du même acabit. Mais je me garde bien de lui dire. C'est le genre d'erreur qu'on fait rarement deux fois. Il fera sans doute plus attention la prochaine fois qu'il passera dans le coin. Je suis content d'apprendre que Mallory est dans la région. Je me fiche de savoir ce qu'il y fait et je trouve dommage qu'il n'ai pas réussi à capturer de Munja. J'aurais adoré pouvoir étudier un spécimen vivant.

Je lève mes yeux de mon calepin, visiblement content de mes croquis et des mes brèves notes. Je lève les yeux au ciel pour me rappeler la manière dont cette passion des insectes m'est venu.

"J'imagine que ça m'est venu... Naturellement ? Mes frères étaient à fond sur les pokémon Roche à l'époque et fréquentaient l'Arène d'Argenta. Mais j'ai toujours été attiré par la Forêt de Jade et les Insectes. Pas loin de Jadielle d'ailleurs. Ils sont plus mignons sans doute. J'ai toujours trouvé les pokémon Roche un peu trop... Comment dire... Bourrins et rustres ? Bref, c'est dur de leur montrer de l'affection. Vous iriez caresser un Onyx ou un Racaillou vous ?"

Je déclame d'un trait dans une sorte de monologue. Je galère d'ailleurs pour reprendre ma respiration, ma voix se faisant plus menue sur la fin. C'est pas mon genre de faire de longues tirades, surtout à des humains. Mais les pokémon me passionnent et les Insectes tout particulièrement. Je ne pourrais jamais contrôler mon flow en parlant de ces derniers. J'ai tout simplement envie que les gens connaissent mieux ce type qui est souvent relégué au second plan et rejeté pour son apparence si particulière... Je m’assois éventuellement sur les fesses et invite mon interlocuteur à faire de même. J'appelle ma petite Bombydou pour qu'elle se place sur ma main lorsque je l'entends mal parler des Insectes. J'ai l'habitude.

"Je suis resté un grand enfant, monsieur l'ami de Mallory. C'est ce qui me permet de tenir dans ce monde rongé jusqu'à l'os par des humains sans cesse plus avides. Et puis ma petite Bibi n'a rien de votre descriptif." Je lui offre un sourire franc avant de me présenter. "Je m'appelle Eugène Tate, je travaille au laboratoire de Castlerain. Mais je n'y habite pas. J'ai préféré m'installer du côté d'Halosis."

Je m'éclaircis la gorge. Cette dernière est étonnamment sèche. Je n'ai pas l'habitude de parler autant. Mais mon interlocuteur est une connaissance. Alors je me fais violence. Même si pour le coup je ne me rappelle absolument pas de son nom. Par que cela ai une grande importance. Mais sait-on jamais, je pourrais être surpris. Je lui demande des précisions.

"Vous êtes toujours en contact avec Mallory ? Vous travaillez peut être à cette fameuse Arène Spectre ?"

Si la pique aurait pu vexer l'homme qui se tient toujours assis en face de lui, son carnet dans les mains, ce n'est pas le cas ; pour le meilleur et pour le pire après tout, ce mec loufoque constitue une excellente attraction pour Oliver, mais il aurait aussi beaucoup aimé, pour une fois, ne pas finir accidenté ou attaqué par des Pokémon sauvages. C'est dans ce genre de moments qu'il s'aperçoit qu'il a encore tout à apprendre sans doute, songe-t-il en jetant un bref coup d'oeil à celui qui finit par relâcher son carnet des yeux pour chercher à répondre, très sérieusement, à une question chargée d'ironie.

« J'imagine que ça m'est venu... Naturellement ? Mes frères étaient à fond sur les pokémon Roche à l'époque et fréquentaient l'Arène d'Argenta. Mais j'ai toujours été attiré par la Forêt de Jade et les Insectes. Pas loin de Jadielle d'ailleurs. Ils sont plus mignons sans doute. J'ai toujours trouvé les pokémon Roche un peu trop... Comment dire... Bourrins et rustres ? Bref, c'est dur de leur montrer de l'affection. Vous iriez caresser un Onyx ou un Racaillou vous ? » Ben. Oui ? Ça lui est déjà arrivé d'ailleurs, Isma en avait un, d'Onix. Pas très aimable, certes, mais cela valait nettement mieux qu'un insecte en tout cas, et puis il adorait qu'on lui gratte la base de la corne, ça chassait les parasites. Il hausse les épaules, le batteur ; c'est sûrement une question de point de vue, tout ça. « Sans vouloir vous vexer, je préfère encore caresser un Tarinor qu'un Statitik, mais j'imagine qu'il y a suffisamment de Pokémon pour  plaire à tout le monde. »

Il aimerait beaucoup se mettre en tailleurs Oliver, même s'ils sont en plein milieu du chemin et que l'homme en face a l'air de s'en foutre royalement. Force est de constater que sa hanche ne sera pas du tout coopérative ; il étend ses jambes, soupire. « Je suis resté un grand enfant, monsieur l'ami de Mallory. C'est ce qui me permet de tenir dans ce monde rongé jusqu'à l'os par des humains sans cesse plus avides. Et puis ma petite Bibi n'a rien de votre descriptif. » C'est pas faux, cela dit ; son Bombydou est affreusement mignon pour un insecte, il n'y a qu'à voir comme elle reste près de son dresseur à l'inverse de Nox, qui une fois la peur passée, gambade joyeusement près de la rive du lac. L'avantage d'avoir un Pokémon comme celui-ci, c'est qu'il ne lui faut pas grand chose pour être heureux. « Je m'appelle Eugène Tate, je travaille au laboratoire de Castlerain. Mais je n'y habite pas. J'ai préféré m'installer du côté d'Halosis.
– Enchanté, moi c'est Oliver Porter. » Peut-être qu'il va s'en rappeler et ne plus le nommer ami de Mallory, l'espoir fait vivre ; ce type a clairement l'air d'évoluer dans son propre monde en effleurant à peine celui des autres. « Vous êtes toujours en contact avec Mallory ? Vous travaillez peut être à cette fameuse Arène Spectre ? » Oliver sourit, secoue la tête. Non pas que ça l'intéresse, cet homme, mais après tout, il a toujours bien aimé discuter.

« Non pas du tout, je suis pas un spécialiste, je viens à peine de me lancer dans le dressage de Pokémon. J'aimerais tenter la Ligue. » Ensuite, il verra bien, mais son seul objectif pour le moment, c'est celui-ci. « Mallory et moi on fait partie d'Asylum, on est amis d'enfance. Ça vous dit quelque chose ? » Non, sans doute pas, hein ? Il y a des affiches partout dans toutes les villes à chaque nouvel album et chaque concert, mais quelque chose lui dit qu'un entomologiste ne doit pas avoir grand intérêt à écouter leur musique. « C'est un groupe de rock qui tourne plutôt bien. Mais bon, passez à son arène à l'occasion, il aime toujours bien discuter avec les gens qui s'intéressent aux spectres, même si ce n'est qu'un seul Pokémon de ce type. » Un insecte creux qui aspire les âmes, pour lui ça ressemble plus à un cauchemar qu'à tout autre chose, mais soit. « Par contre j'admets ne pas comprendre le rapport entre l'enfance et les insectes. »

Je hausse les épaules à mon tour, imitant mon compagnon d'aventure. Je ne vais pas me vexer pour si peu. Même si j'ai du mal à comprendre comment on peut préférer caresser la tête rocailleurs d'un Tarinorme au poil soyeux d'un Statitik. Mais bon j'imagine que tous les goûts sont dans la nature après tout. D'ailleurs, les paroles qu'il prononce résonnent favorablement en moi. Il y a suffisamment de pokémon pour plaire à tout le monde. Une vérité qu'il est bon de se rappeler en toute circonstance.

Après avoir présenté ma petite Bombydou, je suis son regard des yeux et j'aperçois une petite Evoli à la couleur très particulière gambader près de l'eau. Ce n'est pas la première fois que je croise cette espèce mais je dois avouer que ce spécimen est unique. Je m'attarde sans doute un peu trop, détournant brièvement la tête lorsque l'homme se présente à son tour. Je me retiens de lui poser tout un tas de questions sur son compagnon, caressant machinalement Bibi qui vient se poser sur mon épaule.

A la mention d'Asylum, je tique comme si je savais ce que c'était. J'en sais évidemment fichtre rien. La musique moderne et les différents groupes de rock ne me passionnent pas outre mesure. Je me contente de hocher la tête comme un robot lorsqu'il décrit son métier. Je suis d'ailleurs surpris que Mallory s'adonne à ce genre de passe-temps. Comme quoi, on connait jamais vraiment les gens.

Je reste silencieux en écoutant Oliver. Je me cultive, apprenant un tas de choses qui me serviront à tenir une conversation avec tous ces citadines qui pullulent à Castlerain. Le simple fait que je connaisse un membre d'un groupe de rock et Champion d'une arène de surcroît sera un hit lorsque je voudrais me faire mousser. J'aurais aimé que mon métier d'entomologiste reçoive ce genre d'attention. La science en général n'attire pas les foules et ne le fera probablement jamais.

Lorsque j'entends le bruit caractéristique d'un bourdonnement diffus, je me lève et invite Oliver à faire de même et à me suivre. Les Dardagnans considèrent l'endroit comme leur territoire, ils vont revenir nous voir tant qu'on aura pas filé. Je mets mon index à ma bouche pour signaler à mon nouvel ami de se taire et je le guide jusqu'au lac, non loin de Nox. Le terrain est plus accidenté mais je pense que ça suffira niveau distance. Les Dardagnans aussi visiblement. Ces derniers s'arrêtent à l'endroit où nous nous trouvions précédemment. Je me mets à l'aise et reprends la conversation comme si de rien était.

"Ah c'est vous Monsieur Porter qui m'avez dit que les pokémon Insecte n'étaient pas destinés aux enfants de plus de dix ans." Je lui fait un clin d’œil et j’enchaîne. "J'imagine que c'est une affaire de goûts. Comme les pokémon de type Fée par exemple qui plaisent énormément aux jeunes filles et plus largement aux femmes. Me citez pas sur ce coup là hein, j'ai pas les statistiques officielles."

Je ris de bon cœur à ma blague que seuls les scientifiques pourront comprendre. Comme si j'allais affirmer quelque chose sans avoir vérifier mes sources. Haha.

"En tout cas je suis enchanté de vous avoir rencontré vous et votre Evoli. Elle est de toute beauté d'ailleurs. Cette couleur de fourrure est très inhabituelle. Je peux savoir comment cette petite est venue en votre possession ? Elle est avec vous depuis le Kanto ?"

Eugène a-t-il seulement écouté la moitié de ce qu'il vient de dire, Oliver a quelques doutes mais pas question de se formaliser ; il est un peu loufoque ce type, totalement dans son monde aussi, mais Mallo lui a souvent dit qu'on reconnaissait les génies à leur manque évident d'intégration dans une société classique. Peut-être que cet homme-là est extrêmement intelligent mais que personne n'est en mesure de le comprendre ; ou bien lui en est-il persuadé sans pour autant que ce soit vrai, qui sait. En tout cas, cette conversation est plutôt intéressante, et c'est sans vraiment réfléchir que le batteur se lève à la suite de l'entomologiste pour le suivre vers la rive du lac. De toute manière, les bourdonnements n'étaient absolument pas rassurants, alors autant suivre quelqu'un qui s'y connait. Grâce à lui il ne s'est pas fait piquer, et c'est bien là tout ce qu'il demandait, finalement. Après quelques instants de silence, durant lesquels Oliver se demande bien comment ce drôle de gars va relancer la conversation, c'est un ton tout à fait enjoué qui lui répond alors que l'homme lui  jette un regard brillant d'amusement. Quelque chose lui dit qu'il va se foutre de sa gueule, non ?

« Ah c'est vous Monsieur Porter qui m'avez dit que les pokémon Insecte n'étaient pas destinés aux enfants de plus de dix ans. » D'accord. Touché. Et c'est clairement de bonne guerre, il aurait dû réfléchir une petite fois avant de parler avant de passer pour un con, des fois ça ne lui ferait pas de mal. Il peut bien se moquer de Gaspar pour ce genre de conneries, force est visiblement de constater qu'il ne vaut absolument pas mieux, dans le domaine. « J'imagine que c'est une affaire de goûts. Comme les pokémon de type Fée par exemple qui plaisent énormément aux jeunes filles et plus largement aux femmes. Me citez pas sur ce coup là hein, j'ai pas les statistiques officielles. »  D'autant que ce n'est pas tout à fait vrai ; d'ailleurs, la pensée lui laisse échapper un petit ricanement clairement amusé. Il aimerait bien voir la gueule de Mallo si Eugène lui avait dit que les fées c'était pour les gonzesses, alors qu'il rêve d'avoir un Ponyta de Galar depuis vingt ans. Mais il ne répond pas tout de suite, Oliver ; de toute manière, ce type est un vrai moulin à paroles une fois qu'il est lancé, alors autant attendre qu'il ait fini pour le reprendre, s'il en a seulement envie. Il a juste un peu de mal à comprendre pourquoi il rigole, ça doit être un truc de scientifiques, sans doute. Lui, il est loin d'être suffisamment intelligent pour ça.

« En tout cas je suis enchanté de vous avoir rencontré vous et votre Evoli. Elle est de toute beauté d'ailleurs. Cette couleur de fourrure est très inhabituelle. Je peux savoir comment cette petite est venue en votre possession ? Elle est avec vous depuis le Kanto ?
– C'est un garçon, répond le batteur avec un petit sourire, tandis que Nox tourne la tête pour les regarder tous les deux, inclinant  une oreille en comprenant assez vite qu'on parle de lui. Il est chromatique, c'est pour ça qu'il est gris. J'en ai deux dans mon équipe, je crois que mon retour de Lathea a eu son lot d'assez bonnes surprises, finalement. » Entre lui et Meleys, on peut dire qu'il est gâté, le batteur. « Il s'appelle Nox, et non, je l'ai trouvé ici. Dans une clairière au nord de Jaeda, ça vaut clairement le détour d'ailleurs, si vous aimez bien voyager. » Lui, quelque chose lui dit qu'il aime beaucoup trop aller se promener partout pour passer à côté d'un bon coin à Pokémon ou simplement pour se balader. Est-ce qu'il voit son laboratoire, de temps en temps ? « D'ailleurs  j'me suis toujours demandé d'où ça venait, les changements de couleurs chez certains Pokémon. C'est génétique ? Y'a  bien des insectes chromatiques, vous avez sûrement dû vous pencher sur la question, non ? » Tant qu'à marcher avec  un homme de sciences, autant lui demander deux trois informations ; ce serait dommage de ne pas en profiter, non ?

Je connais bien cette fameuse clairière pour y être déjà allé dans le cadre d'une exploration sommaire. Je voulais vérifier que les informations de mes compères du laboratoire étaient exactes. Il s'agit de la Lumiclairière. Je compte évidemment y retourner et le simple fait qu'il y ait des Evolis renforce un peu plus cette idée. Mais je suis jamais chanceux lorsqu'il s'agit de rencontrer des pokémon que je souhaite ardemment étudier...

"Un mâle ? J'aurais pourtant juré que sa queue finissait en forme de cœur."

Je me retourne et me penche sur le côté pour avoir une meilleure vue sur la queue du petit Evoli. Effectivement, c'est bien un garçon comme Oliver me l'a annoncé, sa queue ne se terminant pas par un cœur. Ca devait être une illusion d'optique vu de loin. J'adore ce pokémon. Il est super mignon en tant que tel mais possède tellement d'évolutions sympas. C'est d'ailleurs un des seuls à être affecté à ce point par les fameuses pierres d'évolution. Une tare génétique à n'en pas douter. Oliver semble vouloir évoquer le sujet et cela me va à ravir. C'est toujours mieux que de parler musique et rock & roll. Je vérifie que les Dardargnans restent bien inoffensifs et à distance.

"Alors l'origine de ces changements de pigmentation de la peau ou de la fourrure de certains pokémon est souvent débattue chez les scientifiques, généticiens en tête."

Je fais une pause pour évaluer ce que je dois dire ou non. Tout le monde n'est pas prêt ou intéressé à comprendre les détails du fonctionnement de la génétique. Je suis moi-même un novice dans le domaine. Mon expertise ce sont les pokémon Insecte après tout. Je réajuste ma position, me mettant en tailleur comme mon interlocuteur.

"J'ai pu étudier plusieurs pokémon chromatiques durant ma carrière, même si je n'ai jamais eu la chance d'en avoir pour compagnon. Et tes réflexions sont justes, il y a de grandes chances que cela soit génétique. Même si personne n'a jamais pu analyser et trouver le gène responsable de cette mutation. Il parait qu'il existe des appareils qui permettraient de faire ressortir ce gène, même chez les pokémon sauvages. Mais j'en suis pas convaincu. Ce sont des histoires à dormir debout."

Je reprends mon souffle après ce petit monologue. Je suis content qu'Oliver s'intéresse à la science, même s'il s'agit d'un sujet relativement répandu chez les dresseurs. J'aime pas trop casser l'ambiance alors je préfère enchaîner. J'aurais aimé lui donner la pareille mais j'y connais absolument rien en musique. Je tente quand même.

"Vous trouvez le temps d'assouvir votre passion du dressage Mallory et toi alors que vous êtes dans un groupe et que vous vous produisez un peu partout ? En plus ça ne doit pas être évident d'écrire des textes et de trouver des sons adéquats ?

A terme, Oliver adorerait posséder toutes les évolutions des congénères du petit Nox, qui à présent se promène tranquillement autour d'eux, prêt à aller taquiner tous les Pokémon sauvages qu'il rencontre. C'est un Evoli téméraire et gentil, qui a besoin de se dépenser ; il n'y a qu'à voir avec quel panache il s'en va embêter un Pandespiègle qui s'était tranquillement calé dans un buisson de roseaux. Il soupire, amusé, tourne la tête ; il a posé une question au scientifique et il a très envie d'avoir la réponse. Avec deux chromatiques dans son équipe, il se demande bien par quel miracle il peut avoir autant de chance, finalement. Et puis, quelque chose lui dit que le sujet doit beaucoup plus l'intéresser que des histoires de chanteurs, de tournées et de concerts. Les hommes atypiques comme lui ne s'intéressent sans doute qu'à leur passion, ce qui les rend passionnants lorsqu'ils en parlent, mais parfaitement hermétiques à tout le reste.

« Alors l'origine de ces changements de pigmentation de la peau ou de la fourrure de certains pokémon est souvent débattue chez les scientifiques, généticiens en tête. » Oui, il s'en doute, un peu comme tous les sujets où on a pas vraiment de réponse concrète. Ses cours de science datent de l'école, donc il doit bien reconnaître que le sujet lui paraît un peu nébuleux ; mais là, il compte très clairement sur Eugène pour vulgariser face aux imbéciles comme lui, et c'est plus intéressant qu'une thèse sur ces abominables Dardargnans. « J'ai pu étudier plusieurs pokémon chromatiques durant ma carrière, même si je n'ai jamais eu la chance d'en avoir pour compagnon. Et tes réflexions sont justes, il y a de grandes chances que cela soit génétique. Même si personne n'a jamais pu analyser et trouver le gène responsable de cette mutation. Il parait qu'il existe des appareils qui permettraient de faire ressortir ce gène, même chez les pokémon sauvages. Mais j'en suis pas convaincu. Ce sont des histoires à dormir debout.
– Des machines qui permettraient un changement de couleur chez les... petits des Pokémon chromatiques ? Si c'est ça ça a l'air un peu délirant, quand même. » Il parle de quelque chose dont il ne sait rien, mais les hommes ont toujours adoré jouer les petits chimistes, et souvent au détriment du bien-être des Pokémon, après tout.

« Vous trouvez le temps d'assouvir votre passion du dressage Mallory et toi alors que vous êtes dans un groupe et que vous vous produisez un peu partout ? En plus ça ne doit pas être évident d'écrire des textes et de trouver des sons adéquats ?
– Ah, répond-il avec un petit rire, conscient de l'effort du scientifique pour s'efforcer de s'intéresser à un domaine qui le dépasse totalement. En fait, je suis dresseur depuis peu de temps. On a fait beaucoup de tournées dans pas mal de régions et ça ne laissait pas du tout de temps à d'autres activités. » Sans parler des drames, des disputes, de toutes ces conneries qui leur ont fait perdre un temps fou. « Mais Mallory a été rappelé à Lathea pour prendre la place du champion de Castlerain, alors on a tous suivi. Et on a ralenti la composition, les répétitions, les concerts... donc ça laisse un peu plus de temps à tout le monde, enchaîne-t-il en grimaçant, gêné par sa hanche blessée. » Le dressage, ouais, mais à petite dose parce que son corps ne supporte plus l'effort depuis très longtemps. « Mallo est multitâches, il ne supporte pas de ne rien faire. Moi j'suis du genre tranquille, voilà pourquoi j'ai tendance à aller me promener au bord d'un lac pour m'entraîner plutôt que dans les endroits un peu plus périlleux. Mais bon à l'évidence peu importe l'endroit, si pépin il doit y avoir, ça arrive... il y a une semaine je me suis fait attaquer par une colonie de Piafabecs près de Lucinel. » Il hausse les épaules, sourit. « En somme vous êtes sûrement meilleur scientifique que moi dresseur. Beaucoup plus téméraire, ça c'est certain. » Il n'y a qu'à voir comme il s'en tapait parfaitement de se faire harceler par des Dardargnans bourdonnants, hein.