Vous êtes vous déjà senti observé ? Par quelque chose de plus ou moins malin, une sensation qui vous pique dans le dos si intensément que vous ne pouvez presque pas résister à l'envie de vous retourner ? Scarlett se sent comme ça à tous les jours, et les heures nocturnes sont les pires. Elle n'a pas d'horaire de sommeil particulier - étant donné qu'elle dicte ses propres heures de travail maintenant qu'elle n'est plus à l'université et dépravée de sommeil - mais elle a tendance à dormir le jour puisque c'est le moment où les esprits sont plus cléments. Elle savait qu'il la suivrait, le démon de son enfance. Il la suit toujours, peu importe où elle va, et elle est à cours d'idées sur comment se protéger. Elle retrouve les croix installées tournées à l'inverse, du liquide étrange sur les murs et elle s'est même acheté un outil pour leur parler, une boîte à esprit ou spirit box pour tenter de comprendre. Pourquoi elle? Pourquoi depuis son enfance? Apparemment, ça ne fut pas la bonne chose à faire et maintenant, il est en colère. Si bien qu'elle refuse de mettre les pieds dans la maison pour ce soir, préférant s'évader dans les rues vides et toutes aussi hantées de Castlerain.

La ville est magnifique, vue de nuit. Elle est transcendante, et lui rappelle beaucoup les fois où elle a lu les rumeurs sur la ville de Lavanville, à Kanto. Scarlett y croit, bien entendu. Elle sait que les esprits ne s'arrêtent pas à un endroit. Ils sont nombreux, et ils l'exténuent un petit peu plus à tous les jours. Prada flotte calmement près de sa dresseuse, et la scientifique remercie Arceus d'avoir au moins la compagnie de son Pokémon pour passer les moments les plus difficiles. Le pire, c'est que Scarlett, elle n'est pas médium. Les fantômes, elle n'arrive pas à les comprendre, à savoir pourquoi. Pourquoi elle, pourquoi toute sa vie ? Les paralysies du sommeil, ce n'était pas suffisant, pour l'esprit malin qui s'est attaché à elle? Le soupire s'échappe de ses lèvres sans qu'elle n'y puisse rien, complètement abasourdie par la situation. Étourdie, elle décide d'entrer dans un café pour aller se chercher un espresso, puis d'en ressortir par la suite pour continuer sa balade nocturne. Elle ne doit pas rester statique, elle doit bouger, il ne doit pas la suivre.

"Forêve?" Prada regarde derrière elles et Scar se fige. Sont-elles suivies? Qu'a-t-elle vu? Est-ce que son petit fantôme peut voir les esprits? La tête qui ne se sent pas bien, elle décide de s'asseoir, et de mettre la tête entre ses genoux, comme proposé par les docteurs qu'elle a rencontré par rapport aux vertiges. Pourquoi est-elle aussi intéressée par les Spectres alors qu'elle est hantée? Scarlett n'en a aucune idée, si ce n'est qu'elle est certainement masochiste. "Reste ici, Prada." Elle ne supplie pas la fantôme d'aller se lover contre elle, et pourtant, la Feuforêve ne perd pas de temps. Elle sourit, et rit lorsque son amie tente de s'approprier le café. "Oh non, la dernière fois, ça a bien mal fini, remets-moi ça!" Le spectre rit aux éclats en s'envolant avec la tasse de carton de la scientifique, qui, complètement exaspérée par le comportement de Prada et en même temps fascinée, perd les sombres pensées qui ont traversé ses esprits quelques instants plus tôt, et profite un peu plus de la nuit, en courant après son Pokémon.

Cette période où les nuits se font plus longues ; incontestablement, il s’agit de la saison préférée d’Heathcliff. En ces temps où l’obscurité est présente plus rapidement, il n’est pas très recommandé de se balader longuement dans les rues de Castlerain. Le scientifique en a bien conscience mais ça ne l’empêche pas de traîner dans les environs de son appartement et si cette attitude peut le faire passer pour un inconscient, lui sait qu’il peut compter sur ses partenaires Pokémon en cas de problème. Ses partenaires sont bien plus à l’aise dans le noir, même Asmodée est bien moins apeuré dans ces circonstances. Quant au Pendragon, il a moins la sensation d’être oppressé par les grands et nombreux bâtiments qui font la capitale. Le soir, tout est différent : il y a beaucoup moins de gens dans les rues, les lumières sont tamisées et parfois même totalement absentes dans certaines rues plus insalubres. L’ambiance, l’atmosphère d’une manière générale change pour laisser place à un environnement un peu plus mystérieux - inquiétant diront certains. Pour Heathcliff et ses Pokémon, c’est un peu plus comme un retour à la maison.

Alors il se promène, le Pendragon ; Asmodée, son Polichombr flottant à ses côtés - bien moins collé qu’à l’accoutumée - et l’esprit parti dans ses pensées. Il en a fait du chemin et pourtant, il est loin d’être arrivé au bout de la route, il le sait. Il a encore de nombreuses choses à faire avant de pouvoir définitivement être en paix avec lui-même. Mais la détermination, la volonté de réussir, ce n’est clairement pas ce qui lui manque. Et ces balades nocturnes l’aident à réfléchir, à faire le point sur ce qu’il a déjà fait et sur ce qui lui reste à parcourir. Ces promenades au clair de lune, le Johtien les savoure. C’est quelques heures où il se sent étonnamment libre et capable de tout. Et la plupart du temps, personne ne vient perturber cette harmonie. Sauf ce soir. Perdu dans ses pensées, le médium ne fait pas attention au Pokémon qui arrive rapidement juste en face de lui. Résultat : il le percute de plein fouet et le contenu de la tasse en carton se déverse sur les vêtements du trentenaire qui recule aussitôt en levant les bras. « Je ne savais pas que les Feuforêve pouvaient être amateurs de café. Et pourtant, je vous connais bien. », dit-il dans un sourire mi-figue, mi-raisin en ôtant rapidement sa veste salie par le liquide brûlant. Et d’abord, qu’est-ce qu’il fait dehors, ce Pokémon ? Il doit bien être avec quelqu’un, non ? Heathcliff s’apprête à lui demander où est son dresseur lorsqu’il voit une femme arriver en courant. « Vous êtes sa dresseuse ? Si c’est le cas, désolé mais vous venez de perdre votre boisson. », pour appuyer ses dires une fois qu’elle se trouve à sa hauteur, il désigne sa veste puis la tasse vide qui repose toujours sur le sol.