Pourquoi est-ce qu’il était toujours plus simple de faire le chemin dans un sens que dans l’autre ? Judicaël s’était rendu à Castlerain afin d’acheter quelques ouvrages et pièces de théâtre afin de pouvoir continuer à travailler sur la sienne. Il avait fait l’allé en transport en commun, mais il avait décidé de rentrer chez lui en prenant son temps, en explorant La Lande. Malheureusement, le dramaturge n’était pas un grand explorateur et n’avait pas un très bon sens de l’orientation. Cela faisait maintenant deux heures qu’il cherchait la direction à prendre pour se rendre à Halosis. Pamina et Cérés volaient au-dessus de sa tête pour l’aider et Andromaque était perchée sur l’épaule de son dresseur. Mais même à quatre, ils n’arrivaient pas à retrouver leur chemin. Judicaël commençait à se dire qu’il allait devoir sortir sa tente pour passer la nuit ici. Quand soudain, son Pijako se mit à crier.

_ Quelqu’un ! Quelqu’un !

Un soupir de soulagement s’échappa des lèvres du dramaturge et il suivit son Pokémon jusqu’à une jeune femme qu’il interpella en s’épongeant le front.

_ Excusez-moi. Est-ce que vous pouvez m’aider ? Je cherche une direction ?

Andromaque poussa un petit cri joyeux en observant avec curiosité les cheveux colorés de l’inconnu.

En arrivant devant la jeune femme, Judicaël remarqua qu’elle n’était pas seule. Elle aussi était accompagnée d’un Pokémon, un petit Scrutella. Le Flabébé le remarqua aussi très vite avant de se laisser tomber sur le sol pour aller discuter avec le Pokémon de type psy.

_ Merci beaucoup. Dit le dramaturge soulagé.
Je n’avais pas réalisé que c’était si grand, j’aurais dû prendre une carte. Confessa-t-il en se grattant la tête.
Je cherchais à aller à Halosis, en passant par Thiapolis. Et vraiment désolé du dérangement.

Andromaque n’avait pas les mêmes priorités que son dresseur. Elle était heureuse de faire la connaissance du Scrutella et commençait à chantonner devant le Pokémon Psy. Pendant ce temps, Pamina volait toujours au-dessus de son dresseur, surveillant les possibles menaces. Ce fut ainsi qu’en voyant un Pokémon sauvage s’approcher un peu trop près à son goût du Flabébé, elle lança une attaque Picpic sur un Tortipouss qui n’avait rien demandé.

Pamina était bien trop protectrice et caractérielle parfois, mais c’était dans sa nature. Après des années de cohabitation, Judicaël savait que son Pijako ne changerait pas. Néanmoins, il avait toute confiance en elle. Elle était jalouse et aimer répandre des rumeurs, mais elle était toujours là pour défendre sa famille et pour aider son dresseur quand il était dans le besoin.

_ Désolé pour Pamina, c’est une mère dragon.

Judicaël hocha doucement la tête lorsque la dresseuse en face de lui mentionna la spécificité de la ville. Cependant, le dramaturge n’y allait que pour faire une halte avant de rentrer chez lui, pas pour le tourisme.

_ Tu serais prête à m’accompagner ? C’est très gentil, mais je ne veux pas te faire perdre ton temps. Si besoin, je débrouillerai avec tes explications.

Il ne voulait vraiment pas être un poids, un ralentissement pour la jeune femme qui semblait proposer son aide sans rien attendre en retour.

Un Togekiss projeta son ombre au-dessus des deux dresseurs, faisant réagir Cérès et Pamina qui se préparèrent à se défendre, mais en voyant que c’était un Pokémon dressé, ils se détendirent. Le Pijako reprit sa ronde de surveillance.

_ Il est magnifique. Dit le dramaturge en souriant.
Moi, c’est Judicaël. La furie, c’est Pamina. Le beau Charmillon c’est Cérès et le Flabébé s’appelle Andromaque.

En entendant son nom, Cérès vint se poser dans les cheveux de son dresseur pour écouter la conversation. Il poussa un petit cri joyeux.

Un léger sourire se dessina sur le visage du dramaturge en entendant les mots de la jeune femme, une sorte de remerciement muet pour comprendre le comportement de son Pijako. Pamina était tout sauf douce et calme. Judicaël avait pourtant fait de son mieux pour l’éduquer, peut-être un trop, sans doute qu’il l’avait un peu trop gâté quand ils n’étaient encore que tous les deux.

_ Elle m’a sauvé la mise plus d’une fois et pas que face à une menace. C’est une vraie chef de famille, même avec moi. Plaisanta-t-il.

Judicaël expliqua qu’il ne voulait pas qu’Alix se sente obligé de l’accompagner. Après tout, il avait trente ans. Il était capable de se débrouiller seul s’il le fallait. Cependant la jeune femme souhaitait aller avec lui.

_ Encore merci ! Oh, j’espère que si tu entends parler de moi un jour aux nouvelles, c’est parce que ma pièce marchera et non que je me suis perdu.

Lorsque la Scrutella rejoignit sa dresseuse, Andromaque en fit de même et grimpa de nouveau sur l’épaule de Judicaël. Cérès restait dans les cheveux du dramaturge. Le Charmillon n’était pas un Pokémon très courageux et la présence de Judicaël avait le don de le rassurer. Le dramaturge avait été là lorsqu’il était sans défense sous la forme d’un Armulys, ça signifiait beaucoup pour Cérès.

_ Les types vol ? Répéta Judicaël sans trop comprendre, puis il regarda ses Pokémons.
Ah, non. C’est peut-être eux qui ont un penchant pour moi. Je t’avoue ne pas y avoir pensé quand je les ai rencontrés.
Et toi ? Tu as une préférence ?

Une mimique d’amusement s’étira sur le visage de Judicaël en voyant la surprise sur le visage de la jeune femme lorsqu’il annonça ne pas avoir plus d’affinitéd avec les types vol que les autres. Il ne s’était pas rendu compte qu’il en avait autant avec lui. Tout ça s’était fait au fur et à mesure des rencontres sans que le dramaturge n’y réfléchisse. Ça c’était fait naturellement. Ce fut au tour d’Alix de parler de son affinité avec les Pokémons. Judicaël l’écouta avec attention.

_ Je ne suis à Lathea que depuis quelques mois, je n’ai pas encore fait le tour de toute la région.
Je comprends que tu aimes les types sol, j’aurais sans doute été pareil que toi à ta place. Je devrais aimer les types eau alors, mais…

Il ne termina pas sa phrase. Il venait de se rendre compte ce que tout ça signifiait et il ne voulait pas parler et surtout pas affronter une nouvelle fois les souvenirs de l’accident de bateau qui avait pris la vie de son frère aîné. Alors, il chassa tout ça d’un geste de la main avant de se mettre en route, suivant Alix.

_ Écrivain, enfin pour être plus exact, je suis dramaturge. J’écris des pièces de théâtre. C’est grâce à ça que je suis venu à Lathea. J’ai un mécène ici. Expliqua-t-il.
Il m’aide et me permet de vivre de ma passion.
Et toi ? Si j’ai le droit d’être curieux. Lança-t-il en riant.

Même si le dramaturge ne le montra, mais il était soulagé que la jeune femme n’ait pas renchéri sur le sujet des types eau. La blessure avait beau avoir plus de dix ans, la plaie était encore là, béante. Il ne suffisait pas de grand-chose pour la peine et la culpabilité submerge tel un raz-de-marée les pensées de Judicaël.

Le sujet dévia sur quelque chose de plus joyeux, le travail du dramaturge, sa passion. L’écriture avait été le moyen qu’il avait trouvé pour surmonter tout ça, pour exprimer ce qu’il était incapable de dire autrement. C’était aussi ce qui le faisait se lever le matin. Il vivait aujourd’hui une vie qu’il n’aurait jamais imaginé quand il avait seize ans quand toute sa famille était encore autour de lui.

_ Joaillier ? C’est un beau métier. C’est un art sous-estimé. Dit-il avec sincérité.
Tu as raison de profiter de la vie. Ce n’est pas moi qui te conseillerais le contraire. Mais en quoi le Système Gaïa t’a aidé ? Qu’est-ce qui t’empêchait avant de prendre la route pour devenir dresseuse ?

Judicaël était curieux, l’histoire d’Alix semblait passionnante. La fille de joailliers semblait avoir un cœur de diamant. Elle avait accepté d’aider un parfait inconnu, elle ne cherchait pas à en savoir plus que ce qu’il disait. Les personnes comme Alix étaient rares. Cérès semblait du même avis, car il s’envola de la tête de son dresseur pour venir voler autour de la jeune femme en l’observant avec curiosité.