Tu l’as enfin apprivoisée, cette petite Salamèche. Voilà des semaines, que tu essaies, désespérément, tous les jours un peu plus de gagner sa confiance. Tu l’as récupéré dans un élevage, l’éleveuse du coin l’avait trouvée, blessée, affaiblie, abandonnée, désespérément seule. Elle t’a raconté qu’elle avait attendu, qu’elle avait cherché et que, plusieurs fois, le petit Pokémon était retourné à l’endroit où elle avait découverte, sans doute dans l’espoir que l’on vienne la chercher. En vain. Personne n’était venu. Alors, un beau jour, alors que tu étais là, et qu’elle faisait son énième fugue de l’élevage, c’est toi qui étais allé la chercher. C’est toi qui l’avais ramenée, à bout de bras, et puis, au moment de partir, tu avais décidé de l’emmener parce que son histoire faisait sans doute bien trop écho à la tienne. De ton côté, étonnement, tu t’y étais attaché rapidement. Pour elle, ça avait été différent.

Les premiers temps, elle avait semblé t’en vouloir. Tu l’avais arrachée de l’endroit où elle était née, tu l’avais emmenée loin de l’espoir qu’on puisse venir un jour la récupérer, et elle avait été loin d’apprécier. Mieux. Elle avait même tenté de te le faire payer avec une montagne de bêtises dans la maison. Toi ? Tu avais supporté. Sans un mot, sans une leçon, tu t’étais contenté de ranger, et de réparer derrière elle. Elle avait fini par se calmer. Puis, elle avait commencé a accepté les friandises de ta part. Enfin, elle avait consenti à dormir à l’endroit que tu avais prévu pour elle, et puis, elle avait même rapproché son coussin de ton lit à toi, comme si elle se sentait plus à l’aise d’avoir une compagnie proche pour la nuit. Les jours passant, tu l’avais même retrouvée plusieurs fois contre toi, dans ton lit, et tu avais laissé faire. Aujourd’hui, elle te suivait, nichée dans tes pieds, tu avais pris l’habitude de la laisser en dehors de sa Pokéball, parce que, c’était un trait de son caractère. Si elle acceptait, ponctuellement d’y entrer quand tu le lui demandais, il était clair qu’elle préférait l’extérieur, et ça, tu l’avais intégré, au point de la laisser vagabonder à sa guise au maximum.

Ce que tu avais remarqué, avec elle, aussi, c’est qu’elle appréciait les longues promenades. Alors, à chaque fois que tu en avais le temps, tu sortais, tu choisissais un endroit pour l’y emmener, et tu la laissais faire. Peu à peu, elle semblait prendre assez de confiance pour s’éloigner, et, aujourd’hui, dans la forêt, c’est avec joie et surprise que tu constates qu’elle a quitté la sécurité de tes pieds pour s’aventurer plus en avant. Elle fouille. Découvre. Elle croise des Pokémon sauvages et s’en approche, parfois, il y a des échanges qui sont hors de ta portée, que tu ne comprends pas, mais tu ne t’en préoccupes pas. En fait, tu n’as d’yeux que pour elle, qui grandit, doucement, et si rapidement à la fois. Qui évolue. Qui change. Qui peu à peu, élude son passé douloureux, comme tu as su le faire, bien des années auparavant.

Malheureusement, Ethan, toi qui pensais avoir du calme dans cette grande forêt, tu déchantes assez rapidement quand un éclat de voix te parvient, fait sursauter la Salamèche, qui, aussitôt reviens dans tes pieds. Si tu soupires, et que tes yeux suivent ton Pokémon durant quelques secondes, tu finis par faire porter ton regard plus en avant. Tu vois distinctement cette femme, puis cet homme qui se font face. Et si, au départ, tu songes à un couple en balade, tu remarques assez rapidement que les échanges entre eux sont houleux, et c’est quand l’homme se saisit de la jeune femme, et que tu la vois se débattre qu’évidemment, tu te décides à intervenir.

Azel te suis avec prudence, alors que tu avances. « Hé ! Elle a dit non, reculez, et relâchez là ! » Tu ordonnes de cette voix si autoritaire qui n’appartiens qu’à toi, et dont tu n’uses que lorsque c’est nécessaire. « C’est pas tes affaires, va voir ailleurs. » Et toi qui n’a que peu de patience, Ethan, tu ne supportes pas tellement son insistance. Tu pourrais montrer ta plaque immédiatement, mais tu ne le fais pas, à la place, tu t’avances, tu viens te placer près d’eux et ta main se pose, avec force, sur le bras de l’homme en le saisissant d’une poigne puissante, tu sers, autant que tu le peux, pour lui montrer sans en faire trop que tu sauras faire usage de la force si c’est nécessaire. « J’ai dit … lâche là. »

Tu ne supportes pas ça. Tu ne comprends pas ça, non plus. Tu es tellement respectueux, silencieux, vis-à-vis des autres, que tu ne parviens pas à concevoir le fait qu’un homme puisse approcher une femme de cette manière. La suivre. La forcer. La toucher, sans même attendre un consentement. Sérieusement, qu’est-ce qu’il espère, en faisant ça ? Dans quel monde est-ce qu’un tel comportement pourrait amener quelque chose de bon, hein ? Incompréhensible. Du coup, en voyant que la brune peine à se défaire de la prise, probablement rude de cet homme bien massif, tu interviens, tu viens vers eux, pour tenter d’abord de la jouer fine, en lui demandant simplement de la relâcher. En un sens, tu espères que ta présence suffise à le faire renoncer à elle. Dans la plupart du temps, ça fonctionne. Malheureusement, pas aujourd’hui, parce que l’homme ne semble pas ravi de te voir venir troubler leur … échange. Evidemment, tu ne laisses pas tomber, mieux, Ethan, tu passes au niveau supérieur en venant provoquer un contact pour lui montrer que s’il le faut, tu es toi aussi capable d’utiliser la force pour arriver à tes fins, quand bien même tu détestes ça.

Au moins, ton geste à pour effet de lui faire relâcher la jeune femme et en sens, tu estimes que tu as gagné, même si maintenant, c’est sur toi qu’il est focalisé. En fait, Ethan, il approche, il vient se poster juste devant toi, pour te montrer, te prouver à quel point il te surpasse. Et c’est vrai, tu es sportif, tu n’as probablement rien à envier à personne, il n’empêche qu’il est bien plus grand, plus large aussi, qu’il est surement plus fort. Pourtant, ça ne t’empêche pas de lever la tête vers lui, de soutenir son regard, de lui tenir tête parce que, clairement, tu n’es pas du genre à te laisser impression, d’un, et ensuite, il est hors de question que tu laisses cette jeune femme à sa merci. « Tu devrais t’en aller. » Que tu commences par lui siffler, alors que de son côté, il te rappelle qu’il l’a … vue en premier et que tu n’as pas spécialement le temps de faire, ou de dire quoi que ce soit, que la brune se remet à parler. Elle est vive. On sent bien qu’elle a un caractère bien trempé, et qu’elle n’est pas du genre à se laisser faire, parce que malgré la taille de ce type, elle lui rappelle ce qu’elle est, et surtout, qu’il n’a aucune manière.

Le problème, c’est qu’elle est … plutôt agressive, elle aussi, mine de rien, et que ça ne plait pas à son agresseur. En fait, elle a réussi à le ramener vers elle, et ça, Ethan ça ne te plait pas du tout. Et pour cause, la main de l’homme se lève, et si tu crains, pendant un instant qu’il ne la touche, elle parvient, par tu ne sais quel miracle à éviter la gifle qui aurait pu faire mal. Si elle trébuche, tu ne sais comment, tu viens la rattraper entre tes bras, et puis, tu la gardes contre toi, tout en la mettant un peu en retrait, tandis que tu viens, enfin, sortir ta plaque pour la mettre sous le nez du type.

Peut-être, cependant, aurait-il été préférable que tu fasses ça bien avant, Ethan. Tout à l’heure encore, ça aurait peut-être été suffisant pour le faire fuir, mais là, l’échange qu’il vient d’avoir avec la brune semble l’avoir mis dans tout ses états. Il est littéralement en train de bouillir, et ta plaque, il la balaye d’un revers de la main, avant de venir empoigner le col de ta veste. Dans un réflexe, tu repousses la jeune femme sur le côté pour lui éviter de prendre un coup, et si elle avait réussi à esquiver la gifle, toi, tu prends le coup de poing qu’il t’envoie de plein fouet. Il frappe ta mâchoire, tu recules, et tu masses quelques secondes l’endroit qu’il a frappé avant de littéralement te jeter sur lui pour lui rendre la pareille … autant dire qu’à ce rythme, ça pouvait durer un moment, et que ça serait surement au plus résistant des deux.