La visite nocturne il y a deux jours semble l'avoir complètement retournée. Esprit ailleurs. Petites gaffes au travail. Maladresse dans les mots et les gestes. Annie s'est même brûlée la main en sortant ses profiteroles du four. Le palpitant au bord du gouffre, l'esprit torturé par cette conversation à laquelle la jolie blonde a rapidement mis un terme en rentrant chez elle précipitamment. Si Eden semble aux petits soins à ses côtés, l'arrivée surprise de sa mère n'a fait qu'encourager les tremblements de son corps. Jugée du regard, la conversation qui a dérivé sur ce mariage arrangé approchant a suffit à la faire pleurer de nouveau. Âme fébrile. Âme fragile. Annie aurait préférée que rien de tout cela n'arrive. Elle n'a rien dit. Rien fait. Elle a ignoré les paroles de cette femme l'ayant mise au monde. Simples hochements de tête silencieux. Aucun choix à faire ainsi. Et finalement, la quinquagénaire a disparu, rentrant aux côtés de son époux dans cette ville qu'Annie fuit comme la peste depuis des années.

Finalement, Joannie ferme la boutique pour l'après midi, comme chaque samedi et se décide à aller faire un petit tour. Ailleurs. Loin de chez elle, lieu qui semble désormais hanté par les souvenirs de cette conversation qu'elle a récemment eu avec un fantôme de son passé. Cœur en peine. Joannie aurait préféré ne pas entendre certaines paroles, ne comprenant clairement pas Astrid dans sa façon d'agir, ni même de penser. Soufflant fort en repensant à la jolie brune, Annie se pince violemment le bras comme pour se mettre en garde, inquiétant aussitôt Eden, qui roucoule tout en la fixant, le regard inquiet. « Tout va bien ma belle, ça va aller, d'accord ? On va aller se balader, ça va nous faire du bien, à toutes les deux. » Mais elle le sait, Annie, qu'elle dit cela, pour tenter de se convaincre sans pour autant être certaine que les choses s'amélioreront par la suite.

Descendant du bus un peu plus tard dans l'après midi après être passée chez elle pour se changer, Annie arbore désormais une salopette en jean noir ainsi qu'un t-shirt orange, cheveux lâchés lui tombant à peine en dessous de ses épaules. Elle s'aventure ensuite près des Grottes Charbi avec intérêt, curieuse de retrouver ce lieu qu'elle appréciait tant autrefois. Et comme si le destin ne faisait déjà pas assez de mal à son pauvre cœur, Annie repère, un peu plus loin, une chevelure qu'elle pourrait reconnaître entre mille. Quel cauchemar. Pense-t-elle tandis que son regard croise celui d'Astrid. Contractant alors la mâchoire, Joannie la contourne, l'ignorant, ne lui adressant pas le moindre mot. Elle s'enfonce finalement sur la gauche, mais Eden se refuse à la suivre, l'appelant, d'un feulement doux. Évidemment. La Lixy sait qu'Annie a toujours été incapable d'oublier Astrid. Soupirant, Joannie enfouit les mains dans les poches de sa salopette, irritée. « Eden, ce n'est pas vraiment le moment de faire un caprice. » Tente-t-elle avant de lancer de nouveau un regard à Astrid. « Je pensais que tu serais repartie. » Avoue-t-elle, sur ses gardes. « Tu comptes revenir vivre dans la région? » Simple question, bien-sûr, mais Joannie cherche à se renseigner tout de même en essayant d'avoir l'air totalement désintéressée.

Comme un mirage, comme un fantôme l'a hantant, Astrid apparaît dans son champ de vision. Palpitant douloureux, ventre se tordant tandis qu'elle s'éloigne rapidement, bien que cela ne soit pas au goût de sa tendre Lixy. La petite féline reste immobile, droite comme un piquet tout en roucoulant à l'encontre du Héricendre de la jolie brune. Soupirant longuement, s'avouant vaincue, Joannie s'approche un petit peu, adressant alors la parole à celle qui lui a brisé le cœur, il y a des années de cela. Jouant nerveusement avec son bracelet, la pâtissière n'ose trop regarder la jeune femme qui semble prise au dépourvu. Elle a le cœur qui bat si fort que c'en est douloureux. « On dirait que tu n'as pas non plus les moyens de continuer à dormir sous un toit dur. » Avoue-t-elle après avoir détailler Astrid du regard. Le sac qu'elle traîne à ses côtés semble bien trop gros pour être un simple sac de randonnée. Joannie a l'oeil et malgré qu'elle ne montre rien, la blonde s'inquiète pour cette femme qui autrefois, partageait ses jours et ses nuits.

Bonheur lointain. Souvenirs éparpillés qui n'ont plus lieu d'être. Elle inspire longuement, s'approchant un peu. Adieu sa petite vie tranquille. De toute manière, n'était-ce pas ce qu'Annie voulait ? La revoir. Avoir des explications. Des excuses. Voilà que c'est chose faite à présent. Pourtant, la jolie blonde ne peut s'empêcher d'être sur ses gardes. Pourquoi reviendrait-elle après tant d'années ? Un élan de courage soudain ? Une remise en question lui ayant fait comprendre qu'elle avait fait la plus grosse erreur de sa vie ? Comment être sûre qu'elle ne repartira pas sans prévenir encore une fois, la laissant à nouveau derrière ? Car Annie ne lui courra pas après. Elle a trop souffert de son départ pour oser faire une telle chose. Astrid tient toutes les cartes entre ses doigts. Tout ne dépend que d'elle et de sa manière d'agir, de parler.

S'accroupissant finalement pour caresser l'Héricendre de la jeune femme, Joannie lui lance un petit sourire. Cette tête brûlée lui a manqué, malgré tout. Elle ne peut lui en vouloir à lui. Il n'a rien à voir dans cette histoire. « Je ne peux pas te pardonner, Astrid. Pas aussi facilement et tu le sais. » Avoue-t-elle avant d'inspirer, se redressant lentement. « Mais je ne t'ai jamais oublié et je n'ai jamais cessé de penser à toi. Tu n'es pas forcée de repartir. » Elle tente, malgré tout, Annie, espérant au plus profond d'elle-même qu'elles pourront recoller les morceaux, mais surtout, qu'Astrid ne se moque pas d'elle une nouvelle fois. Elle veut y croire. Mais sa méfiance reste intacte, aussi désagréable que son palpitant qui stagne dans sa douleur dévorante.

Elle ne sait plus vraiment quoi faire, la douce. Fuir ? À quoi bon. Fantôme d'un passé qui ne disparaîtra jamais, la belle en est certaine. L'ignorer ? Elle en est clairement incapable. Lui pardonner ? Cela est bien trop difficile aujourd'hui et Joannie ne sait pas si elle en sera capable un jour. Pourtant, la jolie blonde se rapproche un peu, tentant de débuter une conversation, tout en restant sur ses gardes. Est-ce qu'Astrid n'a plus de toit sous lequel dormir ? S'inquiéter pour cette dernière est une idiotie, la pâtissière le sait, pourtant, elle ne peut s'en empêcher. L'amour nous rend idiot. Il nous touche là où ça fait mal. Nous rend morose. À fleur de peau. Manipulable à souhait. Et Annie déteste cette sensation qui l'assaille, qui fait palpiter son cœur un peu plus rapidement. Elle pince les lèvres, détournant le regard. « Tu comptes dormir ici? » Elle demande avec douceur, malgré tout, ne pouvant décemment pas parler trop froidement. Ce n'est pas dans sa nature, à Annie d'être désagréable ou même agressive. Bonté incarnée. Douceur et gentillesse. Annie a toujours eu le cœur sur la main. Mais avec Astrid, c'est différent. Elle a l'impression de tomber dans le panneau. De se faire avoir, encore une fois. Et la peur de voir cette dernière disparaître de nouveau l'inquiète. Retomber pour elle ? Elle est déjà en train de le faire, et son esprit en souffre jour et nuit désormais.

Continuant néanmoins ses caresses envers le joli petit Héricendre de la jeune femme aux longs cheveux bruns, Joannie inspire, reprenant la parole, malgré tout, sans se soucier des quelques pokemon sauvages curieux qui viennent à leur rencontre. Fronçant quelque peu les sourcils, la blonde contracte la mâchoire, continuant de caresser le Héricendre, sa Lixy s'approchant alors doucement d'Astrid pour poser une patte contre son mollet en roucoulant, comme pour l'encourager. Elle le sait, la féline, que les deux femmes ne peuvent s'oublier. Eden n'est pas idiote. « Comment pourrais-je le savoir, Astrid ? Comment as-tu pu penser que tu me rendrais heureuse en revenant ici ? Et si j'avais fondé une famille ? Tu te serais pointer chez moi dans l'espoir de me voler un bonheur construit loin de toi? » Joannie se redresse finalement, croisant alors les bras contre sa poitrine. « Je ne sais pas. Je ne peux pas savoir à l'avance si je serai un jour capable de te faire confiance de nouveau. Mais si tu penses vraiment ce que tu dis, tu n'as plus rien à perdre désormais. Alors tu peux rester ici, et voir. Me prouver que tu n'es pas celle qui est partie il y a presque dix ans en me laissant derrière comme un vulgaire objet dont on n'a plus besoin. » Et ça lui tire les larmes, à Joannie, de laisser ces mots sortir d'entre ses lèvres. Larmes qu'elle balaie d'un revers de manche, soufflant fort pour se calmer.

Joannie ne renchérit pas sur le fait qu'Astrid compte réellement passer des nuits dans cette grotte. Elle ne sait pas quoi faire, ni quoi dire. Elle voudrait bien lui tendre la main, la belle, mais il faut avouer que la pâtissière semble bien trop sur ses gardes et elle en a toutes les raisons, après tout. Les mains quelques peu tremblantes, Annie arrête ses caresses envers l'Héricendre de son ex petite amie pour se redresser avec douceur, prenant une courte inspiration avant de pincer les lèvres. Elle cherche ses mots, désireuse d'user d'assez de tact pour ne pas que la conversation s'envenime tout de même. Faible. Elle est si faible face à ce démon de son passé. Elle aurait préféré qu'elle ne revienne jamais perturber son monde. Ou peut-être que non. Peut-être que Annie se ment à elle-même pour se protéger ? Elle ne veut pas espérer bêtement. Penser que les choses pourraient s'améliorer soudainement serait idiot et puéril. Jaonnie est bien trop mature et sur ses gardes pour se laisser approcher si facilement désormais. Même avec les étrangers. Avoir été blessée d'une telle façon par Astrid lui a appris que l'amour n'était pas si bon pour elle. Et depuis, la jolie blonde fuit ce genre de sentiments comme la peste. « Je suis incapable de faire confiance aux autres, Astrid, pas sur le point sentimental en tout cas. Je suis bien dans ma vie, malgré tout. Avec Eden. Avec ma boutique. Avec mon chez-moi. » Avoue-t-elle, tout en penchant la tête légèrement sur le côté. Elle est bien, oui. Mais elle a bien choisit ses mots. Le terme heureuse n'a vraisemblablement pas pointé le bout de son nez.

Essuyant quelque peu rageusement les larmes qui menacent de couler, Annie se remercie intérieurement de ne pas avoir mis de mascara aujourd'hui. Plutôt naturelle au quotidien, il est vrai que la belle blonde ne se maquille qu'assez rarement, contrairement à avant. Se retenant d'amorcer un mouvement de recul lorsqu'Astrid s'approche d'elle, Annie fuit son regard. Près. Elle est trop près d'elle. Une main douce sur son avant bras la fait flancher. Joannie l'écoute malgré elle, hochant faiblement de la tête avant de craquer. Cela ne veut pas pour autant dire qu'Astrid a gagné. Cela ne veut pas pour autant dire qu'elle lui pardonne. Mais Annie fait un petit pas vers elle, venant se blottir contre la jolie brune en prenant une inspiration, humant indirectement son odeur délicate, la même qu'autrefois. Une main dans le dos de l'ancienne dresseuse, Annie ferme un instant les yeux, son front contre l'épaule droite de cette dernière. « Alors ne repars plus jamais, tu m'entends ? Je ne te pardonne pas. Je te déteste, Astrid. Ne pars plus. » Les paroles qui s'emmêlent, et finalement, elle se détache rapidement de celle qui fait toujours battre son cœur, soufflant fort, enfouissant les mains dans les poches de son sweat à capuches. « Je .. peut-être que j'ai envie de te donner une dernière chance. » Peut-être en a-t-elle besoin, surtout, plus que d'envie.

Se blottissant avec douceur contre la jolie brune, Joannie prend une longue inspiration, humant indirectement son odeur délicate qui semble rester inchangée malgré les années passées. Étrangement, elle se sent bien, là. Rassurée. À sa place. Mais elle ne doit pas se leurrer, ni même lui donner trop de choses d'un seul coup. Annie en est incapable, trop méfiante pour le moment. Mais elle se laisse adoucir, petit à petit, alors que ce n'est ce que la deuxième fois qu'elles se revoient. Faible. Si faible face à ce doux visage, face à cette âme dont elle a toujours été amoureuse. Le corps qui se détend, tandis que la belle blonde glisse une main dans le dos de l'ancienne dresseuse, frissonnant quand cette dernière vient lui caresser les cheveux. Le palpitant qui s'agite, mais cette fois-ci, de manière tendre. Aucune douleur dans le corps, elle se sent juste bien. Profitant de cet instant, la pâtissière ferme les yeux, bercée malgré tout, par la magie de l'instant. Qu'elle ne parte plus, par pitié. « Tu en as brisé plus d'une en me laissant partir, Astrid. » Corrige-t-elle aussitôt, sourcils quelques peu froncés. Oui. Annie se rappelle de certaines promesses qui n'ont pas été tenues. Astrid ne peut pas jouer là-dessus, c'est inconcevable, alors, elle la reprend avec rapidité, mais sans une seule once de froideur dans le ton de sa voix.

Frémissant face au baiser contre sa tempe, le cœur battant plus fort que d'accoutumée, Joannie se détache doucement d'elle pour la regarder, fouillant rapidement dans son sac pour venir lui essuyer les joues avec un mouchoir, inspirant longuement. « Je veux bien … te laisser une chance. Ne t'avise pas de me trahir une nouvelle fois. » Renchérit la trentenaire, glissant une main sur la joue de la jolie brune, l'espace de quelques secondes avant de reculer un peu pour retrouver son espace personnel. Ne pas tomber dans le panneau. Ne pas tomber pour elle aussi rapidement. Elle se fait la promesse de prendre son temps, de la surveiller, de faire en sorte de savoir si elle est réellement sincère ou non. Joannie passe une main dans ses cheveux pour les remettre en place, reniflant, les larmes ayant finalement cessées de couler. Les joues humides, Annie les tapote à l'aide de son haut pour sécher son visage, Eden venant se frotter contre son mollet, visiblement heureuse de la voir offrir une seconde chance à Astrid. « Tu peux … squatter mon canapé. Je ne vais pas te laisser dormir ici. » Elle gonfle les joues, gênée et s'éloigne un peu pour regarder les alentours. Elle était venue pour explorer les lieux, après tout.

L'avenir est incertain. Plus qu'il ne l'était hier. Annie a conscience qu'elle ne sait plus rien, qu'elle ne sait plus quoi faire. Tirailler entre l'envie de fuir très loin à son tour, ou de croire en ces belles paroles, présentées par la femme dont elle a toujours été amoureuse, du plus loin qu'elle s'en souvienne. Gamine ayant compris qu'elle préférait les femmes dès sa rencontre avec Astrid. Le palpitant de l'enfant s'excitant chaque fois qu'elle était un peu trop proche d'elle, chaque fois qu'elle déposait ses lèvres contre l'une de ses joues. Elle en a mis, du temps, Joannie, à tout lui avouer, pour qu'au final, les choses deviennent merveilleuses entre elles, avant que tout ne sombre dans un chaos qu'elle n'aurait jamais pu imaginer. Elle ne répond rien à ses paroles. Le fait qu'Astrid n'ait eu personne quand elle n'était pas avec elle la rassure au plus profond d'elle-même. Annie non plus, n'a pas laissé qui que ce soit l'approcher dans ce but. Elle ne s'est jamais senti capable de s'approcher d'autrui dans ce sens. L'amour, ça fait bien trop de dégâts à ses yeux, aussi, n'a-t-elle jamais voulu trouver quelqu'un d'autre après Astrid.

Se détachant finalement de cette dernière, la jolie blonde prend tout de même le temps de sortir un mouchoir de son sac à dos pour lui essuyer les joues avant de le lui tendre pour qu'elle puisse continuer par elle-même. Un mouchoir en tissue, broder à son nom. Elle ne l'utilise jamais, mais l'a toujours avec elle. Cadeau de sa grand-mère, qui n'est désormais plus de ce monde depuis quelques années à présent. Elle lui manque, elle aussi. Unique personne de sa famille avec laquelle elle s'entendait réellement bien. Unique personne de sa famille qui connaissait son secret, celui d'aimer Astrid. « Alors raconte-moi, Astrid. Où es-tu partie ? Qu'as-tu fait de si regrettable? » Demande-t-elle, perdue entre la curiosité et le besoin d'en savoir plus pour pouvoir avancer. Annie inspire, s'éloignant quelque peu pour reprendre ses esprits. Ne pas se laisser toucher par cette dernière. Ne pas se laisser attendrir. Des années d'absences et de silences ne se régleront pas, sous prétexte qu'elle s'excuse et lui fasse de belles paroles et promesses.

« J'aimerais bien, nous sommes venues pour ça, avec Eden. » Annonce soudainement Joannie tout en se tournant vers la jolie brune, les mains enfouies dans les poches de son pantalon. Prenant ensuite son courage à deux mains, tout de même inquiète pour celle qui fut autrefois, la personne la plus importante dans sa vie, Annie lui propose soudainement de venir dormir sur son canapé. Elle le sait. Ce n'est pas rien. L'avoir à ses côtés chaque jour sera une torture, mais elle pourra peut-être la surveiller ainsi, s'assurer qu'elle ne lui ment pas, qu'elle ne se moque pas d'elle encore une fois. « Je ne reçois pas tant de visites improvisées. Ce n'est que le canapé. » Elle hausse des épaules, commençant à s'approcher doucement d'un coin, partant sur la droite, s'enfonçant alors un peu plus dans cette grotte.