Tu n’avais finalement pas mis tant de temps que ça à revenir dans ces grottes. En fait, tu n’avais que pris le temps de t’occuper de la petite Magby, qu’évidemment, tu avais fini par garder avec toi, du moins, pour l’instant. Visiblement, elle était jeune. Très jeune. Selon le médecin que tu avais pu voir en rentrant de ta petite excursion, la pauvre créature sortait à peine de l’œuf, elle n’avait probablement pas été nourrie de sa naissance, jusqu’au moment où tu l’avais trouvée et si elle s’était montrée particulièrement farouche, c’est simplement qu’elle était désorientée, un peu perdue. Du coup, après l’avoir longuement observée, le médecin t’avais laissé l’emmener avec toi, il t’avait donné pas mal de recommandations, ainsi qu’un traitement léger, à base de plantes ne visant qu’à la renforcer et l’aider à reprendre un peu du poil de la bête. Depuis ? Elle avait eu le loisir de manger. En deux jours, elle avait changé du tout au tout. Déjà, Ness – c’est comme ça que tu l’avais baptisée – s’était avérée être particulièrement collante. Normal, sans doute, pour un Pokémon si jeune. Ensuite ? Une vraie pile électrique. Elle avait réussi à épuiser les deux autres en quelques séances de jeu.

Du coup, oui, en la voyant ainsi, bien remise, tu t’étais dit que c’était le moment. Tu ne comptais pas forcément la faire combattre, pour ça, tu irais probablement ailleurs, en fait, tu avais prévu de la laisser dans sa Pokéball, et cette Pokéball, tu l’avais soigneusement glissée dans la poche habituelle de ton sac. Une fois au bon endroit, tu t’étais détourné de l’entrée que tu avais empruntée la dernière fois pour en choisir une autre, parfaitement au hasard, en espérant qu’elle te porte un peu plus chance que l’autre fois. Tu t’étais alors enfoncé, avec facilité, dans les galeries, la grotte que tu avais choisie semblait un peu plus tenir du labyrinthe que l’autre, de ce fait, tu avais passé de longues, très longues minutes à avancer, tourner, faire demi-tour, te balader … des Pokémon, tu en avais croisé, c’est un fait. Mais comme la dernière fois, lorsque tu étais venu, rien n’avait su attirer ton attention. De plus, il avait fallu que tu esquives pas mal d’insectes.

Et en parlant d’insectes, Ethan, c’est justement alors que tu tentes désespérément de te débarrasser d’un Fermite – tu hais les Fermite – un peu trop collant que, subitement, Leigh, ton Bulbizarre, se met à avoir un étrange comportement. Il te fixe, il s’agite, comme pris de panique et alors qu’Azel parvient à éloigner la bestiole, enfin, tu finis par bouger, te retourner. Et tu le sens, hein, cette … résistance, étrange, comme si quelqu’un tenait ton sac. Pourtant, quand tu te retournes, il n’y a rien, ni personne. Tu te retrouves donc à plisser les yeux, alors que le Bulbizarre est toujours en train de s’agiter en te désignant ton sac. Finalement, tu as enfin l’idée de le défaire de tes épaules et la première chose que tu vois, c’est la pochette, grande ouverte. Quand tu plonges la main dedans, tu constates qu’elle est vide. « Où est Ness ? » La Pokéball, oui. Celle de la petite Magby que tu avais mise ici, justement pour la protéger. Tu es pourtant certain d’avoir bien fermer cette pochette, Ethan, tu n’es pas du genre à faire une erreur pareille, tu le sais, et tandis que tu paniques, pour de vrai, que tu regardes tout autour de toi, au sol, pour voir où elle a pu tomber, voilà que Leigh vient tirer ton bas de jean, avant de se mettre à te pousser. Après quelques secondes, il se détache de toi, et se met à courir – c’est rare qu’il coure, ce flemmard – dans une direction bien précise, et tu comprends que tu n’as plus qu’à le suivre.

Tu traverses les galeries sombres en courant, du coup. Tu ne sais pas où va ton Pokémon, mais peu importe, tu lui fais confiance, tu te dis qu’il a ses raisons. Et. Surprise, Ethan ! Quand il s’arrête, quand tu déboules, haletant, et le visage brillant de sueur, tu tombes nez à nez avec un homme, à ses côtés, une jeune femme blonde à l’apparence probablement étrange, mais, ce qui attire réellement ton attention, c’est cette Pokéball, dans la main du gars. Ta Pokéball. Dans tes traits … s’installe aussitôt une forme de colère, ton regard se fait immédiatement bien trop sombre, Ethan, et tu sers la mâchoire, pour te forcer à rester aussi courtois que peux l’exiger ta profession. « Débile, ce n’est pas le mot que j’aurais utilisé. » Quoi que, Ethan. Parce que, là, tu te dis juste qu’elle n’a pas choisi la bonne personne pour jouer à ça. « Lieutenant Parrish. » Tu te présentes, pour … probablement te faire un peu plus menaçant. Et puis, ta main vient brutalement happer la Pokéball, pour la récupérer. « Et on peut savoir pour quelle raison cette Pokéball est passée de mon sac à votre main ? Vous savez que le vol est puni par la loi, rassurez-moi. » C’est ça, Ethan, provoque, tu deviens imbuvable, quand tu es contrarié, c’est fou ça.

Que ce soit clair, Ethan. Tu ne cherches pas à travailler, aujourd’hui. Tu as bien autre chose à faire, et surement pas la motivation nécessaire pour faire du zèle. Tu le ferais probablement, s’il s’agissait de quelque chose de plus « grave » et de dirigé sur quelqu’un d’autre, mais pour le coup, tu as déjà récupéré ta Pokéball, ton Pokémon et … Et rien. En fait. La vérité, c’est que l’homme qui se tient face à toi n’as vraiment pas l’air d’un bandit de grand chemin, avec l’expérience et les années, mon vieux, tu as appris à reconnaître un criminel aguerri lorsque tu en as un sous les yeux, et, en l’occurrence, celui-là n’a pas tellement la tête de l’emploi. Cela dit, Ethan, tu ne sais que trop bien à quel point, à tort, tu as tendance à bien trop te fier aux apparences. Et tu sais aussi comme elles peuvent être trompeuses.

Pourtant, cette Pokéball, contenant ton bébé Magby, vient tout de même d’être prise dans ton sac. C’est un vol, et tu aurais probablement eu plus de mal à remettre la main dessus si Leigh n’avait pas capté quelque chose. Quand tu y repenses, tu as bien senti quelque chose au niveau de ton sac, cependant, quand tu t’es retourné – vivement pourtant – il n’y avait rien, ni personne. Du coup, tu sors ta tête des mauvais jours, ta mauvaise humeur, renforcée par ce larcin, et surtout par le fait qu’après un long temps dans cette grotte, tu n’as toujours pas mis la main sur le Pokémon que tu cherches avec tant d’énergie. Sourcils froncés, tu braques tes yeux bleus, froids, sur l’homme, en le fixant, tout en donnant, et ton identité, et ta profession, une manière, habile diraient certains, de mettre un peu la pression. Tu ne comptes pas sortir les menottes, en revanche, déformation professionnelle, sans doute, tu veux savoir le pourquoi du comment. Tu creuses. Tu cherches. Tu fouines. Tout le temps. Hors de question que tu laisses couler si facilement, ce ne serait pas toi.

Le truc, tu vois, c’est que tu ne te rends probablement pas compte, non plus, que ton attitude est agaçante, et quand cet inconnu, qui te dis étrangement quelque chose, ouvre la bouche, tu prends toute l’acidité de ses paroles en pleine face, et tu grimaces. Tu te sens agressé, et à la fois, mon vieux, ce n’est que le juste retour des choses, étant donné que tu n’as toi-même pas été très engageant. « Votre … » Et enfin, tu tournes la tête, pour fixer, plus intensément cette fille blonde aux côtés du type. Ah. Voici donc ce que tu trouvais si étrange, chez elle, au premier coup d’œil. Ce caractère presque … intangible, cette espèce de transparence étrange, qui, mine de rien, n’est pas si facile à voir, ou à identifier dans la pénombre de ces grottes. « Vous devriez lui apprendre à ne pas faire ce genre de choses … » Tu n’es pourtant pas donneur de leçon, et tu sais aussi que les Ectoplasma sont, par nature, farceurs. De très mauvaises farces, en général, disons que, maintenant que tu sais ça, tu peux te dire que tu as bien de la chance qu’il ne s’agisse « que » de ça. « Je dis ça pour vous … » Que tu ajoutes, en rangeant ta Pokéball, dans sa pochette, en prenant soin de bien refermé. Tu tires même plusieurs fois sur la fermeture, comme si ça allait changer quelque chose, t’assurer qu’on ne pourra plus la rouvrir sans que tu ne le saches.

Un soupire. Voilà tout ce que tu réponds face aux … excuses, particulièrement singulières de l’Ectoplasma. « Ça va, ça va … » Pas très à l’aise, n’est-ce pas ? Cette apparence, alors qu’il s’agit d’un Pokémon, ça te déstabilise complètement. « Oh, et pendant que je suis dans les conseils. » Ouais, visiblement c’est ta journée, tiens. « La prochaine fois, évitez de sortir les crocs de cette manière face à un flic, ils sont pas tous aussi patients que moi. » … Non mais ça, c’est la blague du jour, ou bien ? Non parce que, tu es loin d’être patient, Ethan. « Je comptais pas vous passer les menottes, j’suis pas en service. » Et tu ne comptes surement pas le prendre, ton service, pas aujourd’hui.

Tu es … étrangement calme, Ethan. Toi qui, non, effectivement, n'est absolument pas patient, tu te retrouves finalement à faire la conversation, alors que tu pourrais juste tout ignorer, et oui, lui passer les menottes, à ce type. Le faire sortir de cette fichue grotte, le traîner jusqu'au Poste de Police le plus proche et le balancer derrière les barreaux pour au moins vingt-quatre pour lui faire comprendre à quel point tu n'apprécies pas qu'on joue avec toi. Si tant est que c'est ce qu'il est en train de faire, évidemment. A la place, voilà que tu donnes des conseils, que tu te retrouves dans un rôle qui ne sied absolument pas, et tu sais quoi ? Au final, même si tu n'en montre rien, la casquette que tu essaies d'arborer te mets vite cruellement mal à l'aise, plus encore que la présence de cet Ectoplasma à l'apparence si dérangeante.

Mais tu vois mon vieux, si tu as conscience d'avoir une certaine prestance, et de pouvoir parfois en jouer pour te débarrasser de certains problèmes, force est de constater que ça ne risque pas de fonctionner aussi bien avec ce jeune homme pour le moins oui … étrange. Son visage ne t'es clairement pas inconnu, c'est un fait, mais, tu es tellement en marge du monde en général, que tu peines à mettre un nom dessus, ou à l'associer à quelque chose, un lieu, une autre personne, un souvenir. En réalité, c'est lui-même qui te mets sur la piste, en parlant de son visage sur les affiches d'un concert, et effectivement, tu finis par faire le lien dans un vieux soupire de lassitude. La célébrité. Tu es persuadé que ça doit lui ouvrir bien des portes. Du moins, c'est comme ça que toi, tu vois les choses. Peut-être qu'il parvient à se sortir de bien des mauvais pas, avec sa gueule d'ange, mais toi, tu sais d'avance que ça ne fonctionnera pas avec toi. Tu restes parfaitement fidèle à toi-même. « C'est utile pour se débarrasser des gêneurs. » C'est ta justification, du moins, c'est celle que tu donnes, et si effectivement, elle est pleine de vérité, tu sais aussi que ce n'est qu'en partie vrai. Des raisons de décliner ton identité de cette façon, tu en as beaucoup. Mais en aucun cas tu ne te sers de ta position dans le but de la vantardise, tu n'as jamais eu de quoi te vanter, tu ne sais même pas ce que c'est.

« Vous pensez que c'est quelque chose qui m'effraie ? » Franchement, depuis le temps que tu fais ce métier, tu es déjà tombé sur un bon nombre de gens bizarres, et si, pour le coup, tu ne sais pas trop ce qu'il entends par "malade mental" et bien, toi, tu te dis juste que ce sont les risques du métier, et que, par conséquent, tu les as acceptés en devenant Policier. « Pourquoi un tel conseil ? Vous êtes dangereux ? C'est un avertissement ? » Toujours ce besoin de questionner, de creuser, tant de curiosité, tu appelles ça une déformation professionnelle, la réalité, c'est que, mine de rien, ça fait partie de ton caractère. « J'ai une autre question. » Et tu sais quoi ? Finalement, tu viens poser tes fesses sur un énorme rocher, un peu humide, à quelques pas seulement du type et de son Pokémon, tandis que les tiens viennent s'installer dans tes pieds. « Qu'est-ce qu'un mec aussi … célèbre que vous vient faire un endroit pareil ? » Ouais, une vieille grotte humide, puante, sombre, et pour le moins désagréable.

Dans un bon jour. Ça pourrait presque te faire rire, Ethan, si pour le coup, tu étais de meilleure humeur. Tu n’es clairement pas énervé, cela dit, non, mais par contre, tu es … ronchon. Comme vieil Ursaring que l’on serait venu déranger dans sa grotte, à la différence que tu étais loin d’être en hibernation, en ce qui te concerne, et que t’apercevoir que tu avais pu perdre une Pokéball, un Pokémon, si facilement, t’as clairement fait endurer un sentiment de peur relativement désagréable, pendant un instant. Pour autant, regarde-toi. Tu n’as rien perdu du peu de conversation que tu peux avoir. Peut-être parce qu’il t’intrigue, Mallory. De par sa présence ici, déjà, mais aussi de par son attitude.

C’est cette remarque. Ce … conseil qui éveille un peu de ta curiosité. Tu pourrais prendre ça pour une mise en garde, et pourtant, il te confirme que ce n’est pas le cas. Il est dans un bon jour. En l’entendant, tu supposes que tu n’étais peut-être pas si loin que ça de la vérité, mais cette pensée s’échappe rapidement, et tu finis sur un soupire léger, avant de continuer de le questionner. Tu as toujours été curieux, encore et toujours, c’est ce que tu appelles ta déformation professionnelle, cette tendance à juste … poser des questions, à fouiner. Parfois, sans le vouloir, tu le mets le nez là où tu ne devrais même pas, tu as trop loin. Souvent, il est trop tard lorsque tu t’en rends compte. Comme maintenant, quand il t’explique, peut-être de façon un peu trop détaillée, ce qu’il fait dans les environs. « J’imaginais les Champions s’entraîner dans des endroits moins … paisibles. » Un vrai cliché, n’est-ce pas ? Comme si son statut de champion, ou encore de célébrité, le rendait si différent de toi, ou des autres.

Tu t’étonnes, Ethan, de voir qu’il n’est pas simplement parti. Qu’il ne s’est pas éloigné. Tu as pris le temps de t’asseoir, de t’installer, d’autres auraient pu la fuir, après tout, mon vieux, il ne te connait pas le moins du monde. Peut-être que tu le gênes. Que tu le déranges. Le fait que son Pokémon soit parvenu à subtiliser la ball de Ness n’est certainement pas une raison suffisante pour que tu puisses te permettre de lui tenir la jambe, comme on dit, mais … il est là. Il vient s’appuyer contre cette paroi, il sort un paquet de cigarette. « Je vois … bienvenue au club, je suppose. » Étrange, hein. Célèbre, et pourtant, il a finalement l’air bien trop proche de ce que tu es, de ton caractère. De cette tendance, surtout, à éviter les foules. A les fuir, même.

« Je vais et je viens, ici et ailleurs. » Bon sang, Ethan … qu’est-ce que c’est encore que cette réponse ? Tu fais au moins vingt ans de plus que ton âge véritable, sur ce coup. Un vrai sage, un philosophe dans l’âme ! « On dit que des Malosse sont parfois de passage dans ces grottes … j’y ai déjà passé des heures, je n’en ai encore vu aucun. » Et tu n’es pas du genre à abandonner si facilement, mais il faut avouer que tu commences à douter sérieusement de la véracité de ces rumeurs. « Et puis, je suis comme vous, on croise peu de monde dans ces grottes. » Normalement, du moins. « Impressionnant. » Que tu finis par lâcher, tout en désignant l’endroit où a disparue l’Ectoplasma. « J’ignorais que ces Pokémon étaient capable d’une telle chose … c’est saisissant. » Flippant, aussi.