Ca fait à peine une petite heure que j'ai posé mes valises dans le petit village d'Halosis. Contrairement à beaucoup, j'ai fais ce choix sciemment. D'ailleurs cela n'a pas manqué de surprendre l'agente immobilière locale qui avait plus l'habitude de bourgeois de la ville cherchant une maison de campagne plutôt qu'un petit « jeune » dans la force de l'âge voulant juste un studio sans prétention. Elle croyait même que j'étais là pour prendre la place de l'apprenti boulanger sur le point de quitter Halosis pour la grande ville...

"Youhou ! C'est parti pour l'aventure !"

Je hurle de joie en quittant mon appart' m'attirant déjà les regards de travers d'une populace indigène pas ou peu habituée à ce genre de manifestations. Je m'en moque comme de l'an quarante. Tout ce qui compte c'est l'immense forêt des environs qui attire mon œil depuis bien avant mon arrivée dans la région. J'ai pas choisi de m'installer Halosis par hasard. Je suis entomologiste de métier, je m'intéresse ainsi aux insectes sous toutes leurs formes. J'allais pas m'installer au sommet d'un volcan ou sur une plage en bord de mer...

Ma fidèle Bibi est ma seule compagne. Une Bombydou très chétive sauvée des griffes de ses pairs dans la région d'Alola. La nature est souvent cruelle. Mais contrairement aux hommes, elle ne fait pas exprès. Elle bourdonne autour de ma tête alors que je pénètre dans le sous-bois, rapidement protégé d'un soleil éclatant par une canopée relativement dense.

Je constate rapidement que la fameuse Forêt aux Murmures non seulement porte bien son nom, des petits bruits de fond résonnent dans le sous-bois alors que je perds petit à petit toute notion de localisation. C'est très déroutant mais je ne m'inquiète pas pour autant. La forêt est aussi plus dense que prévu, le soleil ne filtrant que très peu à travers l'épaisse canopée. C'est sans doute à cause de l'heure assez avancée de la journée. Là encore il n'y a pas de quoi s'inquiéter. Je laisse mes yeux inquisiteurs vagabonder au gré des arbres arbustes et autre flore assez abondante à la recherche de traces de passage ou de la moindre chose digne d'intérêt.

J'aurais dû être plus prudent.

Alors que mon attention était fixée sur un buisson à la forme particulière, j'entends un swoooosh au-dessus de la tête et je sens un déplacement d'air. Bibi s’époumone et vient se réfugier entre mes jambes. Je lève les yeux et un pokémon Vol tout de noir et de bleu paré se tient fièrement sur une branche. Il a l'air très intéressé par Bibi et compte visiblement en faire son quatre heures. Il repart aussitôt en piqué.

"Bibi, esquive au dernier moment et attaque le avec Vent Féérique !"

Cela fait plusieurs mois que Bibi m'accompagne lors de mes aventures. Si sa timidité naturelle l'a empêché de devenir une véritable machine à combattre, elle n'en reste pas moins expérimentée. Assez expérimentée pour ne pas fuir au moindre signe de danger. Et assez expérimenté pour me défendre si besoin est. Et puis elle possède plusieurs capacités qui nous permettent de fuir si jamais le danger est trop important.

Lorsque le corbeau arrive à sa portée, elle esquive sur le côté et lance son attaque. Cette dernière le frappe sur le côté mais il ne semble pas ou peu affecté, continuant son vol jusqu'à un arbre un peu plus loin.

"Bibi, cette fois-ci tu n'esquive pas. Attends le dernier moment. Quand il sort ses serres et déploie ses ailes, tu frappes ! Utilise Para-spore cette fois-ci !"

Si Bibi est expérimentée, je ne suis pas en reste, ayant bourlingué plus d'une dizaine d'années à travers toutes les régions du monde. Surtout en milieu forestier je dois l'avouer. Si je sais que mes talents de dresseur ne rivaliseront jamais avec l'élite, j'en ai vu assez pour réagir correctement à la plupart des situations. Du moins j'en ai la certitude...

A son prochain passage, le Cornèbre décélère au dernier moment pour s’emparer de Bibi comme prévu. Cette dernière lance alors une nuée de spores qui viennent frapper le piaf de plein fouet. Désorienté, ce dernier manque sa cible et vient s'écraser contre un arbre avant de tomber au sol, visiblement sonné. Il cherche à se relever mais les spores font rapidement effet et il se retrouve complètement paralysé. Victoire !

J'accours vers Bibi pour m'assurer qu'elle aille bien et mon inspection terminée, je la félicite pour sa victoire ! Petit riquiqui mais maouss costaud ! La Bombydou vient d'étaler un adversaire presque dix fois plus gros qu'elle ! C'est toujours un spectacle grandiose. Une fois la menace écartée, je peux sortir mon pokédex et enregistrer les détails de cette rencontre. Je prends aussi quelques notes sur un calepin, ajoutant Cornèbre à la liste des ennemis naturels de Bibi. C'est toujours bon à savoir. Même si je sais depuis longtemps que les pokémon de type Vol raffole de ceux de type Insecte. Il serait de bon ton à l'avenir de trouver un compagnon capable de se défendre de telles attaques.

Nous reprenons notre route, les yeux rivés sur la cime des arbres...

A trop faire attention et à se montrer trop prudent, on avance plus. Ma progression dans la forêt se fait plus laborieuse. Je fais attention où je marche, histoire de pas faire trop de bruit. Je fais attention aussi à ce qui se passe au-dessus de ma tête. La faute à ma première interaction avec la faune locale. Malheureusement j'en fais probablement trop. Ce qui ne me permet pas d'examiner en détail la flore et les éventuelles traces d'insectes. Mais je me dis que c'est normal pour une première. Après je ne connais presque rien de cette Forêt aux Murmures.

J'entends des Cornèbres au loin. Probablement des copains de celui qu'on a vaincu un peu plus tôt. Connaissant leur vitesse et apparemment leur tempérament revanchard, je me jette immédiatement dans un buisson épais afin de m'y cacher le temps que ça se tasse. Je ne suis pas peureux de nature mais je suis réfléchie. Ca sert à rien d'être vaillant et de déranger tout un écosystème quand on peut l'éviter. Néanmoins, une odeur fétide m'assaille les narines. Le temps de tourner la tête, je tombe nez à nez avec une Moufouette dont le dos est déjà arqué.

Ca pue la merde. Littéralement.

Je connais le mode d'opération de ce pokémon pour l'avoir déjà rencontré lors de mes nombreuses pérégrinations. Je ne dois pas le laisser se retourner et m'asperger...

"Bibi, Vent féérique tout de suite !"

Paye ton anticipation !

Le Moufouette sauvage n'a pas le temps de se retourner que Bibi agite ses ailes et lui envoie une bourrasque de vent en pleine tête, l'envoyant bouler hors du buisson à quelques mètres. Je fais pas le malin en cherchant la confrontation et je quitte le buisson de l'autre côté, détalant comme un lapin. Prendre des coups c'est ok. Puer pendant une semaine ça l'est moins...

Après cinq minutes d'une course effrénée, je suis à bout de souffle. J'ai surtout balancé à la poubelle toutes mes belles théories sur l'intérêt de rester discret dans un milieu naturel... Tu parles d'un scientifique. J'ai encore du chemin à parcourir... Alors que je commence à me demander si cette sortie en forêt aussitôt après mon arrivée était dans mon intérêt, des traces sur le sol viennent troubler mes pensées. Je m'agenouille et détaille les contours de ces dernières.

"Oh regarde Bibi. Ces traces sont fraîches. Allez on les suit !"

Oui je parle à mon Bombydou. Elle est comme une collègue et une amie. Ma seule amie. Ouais c'est triste...

Les traces de pas sont rondes et de petite taille. Je sors mon pokédex et le pointe sur ces dernières. Malheureusement, l'appareil ne match rien. Une chose est certaine ce n'est pas un pokémon de type Insecte. A mon grand regret. Décidément je n'ai pas de chance jusque là. Mais je ne désespère pas. Et puis j'aime bien tous les pokémon sans restrictions, même si j'ai une préférence pour les bestioles. Après quelques minutes de traque, j'entends des petits bruits. Des sortes de bruissements de feuilles ou de branches qui craquent. Je me fige et m'agenouille par réflexe.

"Bibi, pas un bruit."

Je me fraye un chemin jusqu'à un arbre, bien dissimulé derrière. Je jette éventuellement un coup d’œil à la source de ces bruits et je distingue de petites boules bleues nuit. On dirait une petite famille en train de discuter. Ces pokémon sont très étranges, on dirait des sortes de racines enchevêtrées. Mon pokédex me conforte dans mes réflexions.

Je les observe quelques minutes par curiosité mais je préfère ne pas les déranger. Je fais un signe à Bibi et je me retire lentement. Alors que je me retourne pour filer dans l'autre sens, je tombe presque nez-à-nez avec un Saquedeneu ! Ce dernier est de dos mais je n'ai aucun doute sur sa capacité à nous détecter si on fait le moindre bruit.

Le pokémon sauvage semble garder les autres, une sorte de sentinelle. Je ne vais pas attendre 107 ans et je fais des signes à Bibi pour qu'elle se charge de lui dans le feutré. Elle agite ses ailes et un fin nuage de poussière s'abat sur le Saquedeneu.

Le Saquedeneu remarque les spores mais n'a pas l'air de s'en inquiéter. Il les chasse même à l'aide de ses racines lui servant de membres. A défaut de tomber paralysé, l'attaque ne lui soutire que quelques éternuements. C'est un bel échec.

Ca arrive à tout le monde. Je sais que cette attaque ne marche pas à tous les coups. J'attribue cela à la chance même si je me demande parfois sir le type de la cible ne joue pas un facteur important dans la réussite de Para-Spore. Ca ferait d'ailleurs un sujet d'étude intéressant. JE sors mon calepin et l'ajoute à mes observations journalières.

Toutefois Bibi ne semble pas s'en émouvoir, presque énervée que ce pokémon lui résiste. J'en rigole intérieurement alors qu'elle agite de nouveaux les ailes et qu'un nuage de spores plus important recouvre l'intégralité du corps du Saquedeneu.

Bibi ne ratera pas une seconde fois, si ?[/color]

Bibi ne me déçoit pas et le Saquedeneu s’effondre complètement paralysé. J'en profite pour prendre de nouveau la poudre d'escampette. Toujours dans l'idée de ne pas troubler la faune locale outre mesure. Même si je suis inconscient que ma seule présence altère la dynamique des pokémons sauvages de la forêt. C'est malheureusement le comble des observateurs...

Après quelques minutes de marche, je tombe sur un point d'eau. Je me dis que cela fera un excellent spot d'observation. Mais j'en profite avant tout pour remplir ma gourde et donner à Bibi l'occasion de se s'abreuver pour reprendre quelques forces. Ceci fait, j'observe la zone, notant ce point d'eau sur une carte improvisée grâce à la position du soleil. Si j'ai du mal à me repérer à cause de ces fameux murmures qui ont rendu cette forêt célèbre, je sais plus ou moins où je me trouve. L'endroit fera une étape tout à fait honnête lors d'une future aventure.

Je m'installe au pied d'un arbre à quelques mètre de la mare, relativement bien dissimuler derrière un bosquet dont je crois les fruits toxiques aux pokémons. Leur couleur cramoisie ne fait guère envie.

Y'a plus qu'à attendre.

L'attente est longue mais je suis du genre patient. Ca serait un comble pour moi d'être impatient et colérique dans mon domaine d'expertise. A moins de payer des dresseurs pour qu'ils me capturent des pokémon afin que je les étudie en laboratoire. Je connais des scientifiques qui passent plus de temps en laboratoire ou à la bibliothèque que sur le terrain. C'est leur droit mais j'ai toujours pensé qu'il s'agissait que c'était du gâchis et une perte de temps. Observer les pokémon dans leur milieu naturel offre les seuls résultats dignes de figurer dans les revues scientifiques. Bien sûr qu'il faut des gratte-papiers mais ceux qui ne mettent jamais les pieds sur le terrain ne valent rien...

Alors que je m'énerve tout seul sur mes collègues rats de bibliothèque, un petit arbre attire mon attention de l'autre côté de la mare. Je mets quelques secondes à comprendre qu'il s'agit d'un pokémon ! Un pokémon plante ? Je me demande en sortant mon pokédex. Qu'elle est ma surprise en apprenant que c'est un pokémon Roche ! Je reste presque bouche-bée, mon cerveau ayant du mal à assimiler l'information. C'est incroyable. La nature produit des créatures tellement fascinantes. Je l'observe pendant de longues minutes, dessinant même quelques croquis sur mon carnet de notes.

Je fais un beau métier.

Les minutes passent et je ne me lasse pas de toute une faune qui vient s'abreuver au point d'eau. La vision du Simularbre qui se fige à chaque fois qu'il entend un bruit me soutire des barres de rires, silencieux certes mais sincères. J'en viens même à me demander s'il ne serait pas bon de le capturer. Le potentiel de ce pokémon me parait très intéressant, notamment dans le cadre de l'observation. Après tout il semble se fondre complètement dans le décor.

Juste quand je commence à m'extasier devant ce pokémon étrange, un petit gland sur pattes vient interrompre mes réflexions. A deux à l'heure il s'approche doucement du Simularbre. Je le reconnais immédiatement pour l’avoir croisé lors de mon court passage sur Hoenn. Il s'agit d'un Grainipiot. Il a l'habitude de se pendre aux arbres pour passer inaperçu aux yeux des prédateurs. Et pour le coup, il essaye de grimper sur le Simularbre.

"Hahaha."

Je pleure littéralement de rire en le voyant galérer et faire preuve d'une telle maladresse. Je ne résiste pas à dessiner la scène sur mon carnet.

La scène ne semble jamais vouloir se finir, le Grainipiot ne souhaitant visiblement pas abandonner son impossible quête ! Le Simularbre ne lui laissera jamais lui grimper dessus vu qu'il cherche à se barrer après s'être désaltéré. Le status quo est éventuellement brisé par le chant strident d'un pokémon. Ce dernier semble perché juste au-dessus de ma tête et ne semble pas m'avoir vu. Je me décale légèrement et distingue éventuellement ce qui ressemble à un oiseau au plumage bariolé. Mon pokédex m'indique rapidement qu'il s'agit d'un Pijako, un pokémon de type Normal/Vol originaire de Sinnoh. Ce dernier aime imiter les autres pokémon pour effrayer d'éventuels prédateurs.

Et pour le coup ça marche sur des proies...

Son arrivée provoque une petite panique, notamment chez le Grainipiot qui se laisse tomber du Simularbre et qui roule dangereusement vers la mare. Il cherche visiblement à imiter un gland. Mais je pense qu'il n'est pas capable de nager... Je me lève immédiatement pour le secourir. Je donne mes ordres à Bibi ce qui fait s'envoler le piaf et s'enfuir le Simularbre. Au ralenti...

"Utilise Vent Féérique pour arrêter la course du Grainipiot !"